samedi 16 novembre 2013

Furia: per un'arte sinfonica di massa (Traduzione Patrizia Donadello)

Furia: per un'arte sinfonica di massa - il 24 novembre in concerto a Torino
Furia@SUD-Turin Le 22-11 @ Chateau de Faverolles en Champagne (France) - Le 24-11 @ SUD à Turin (Italie) - Le 28-11 @ Teatro di Anghiari dans le cadre de la Pulpito Nites à Arezzo - Italie - Le 30-11 @ Spazioseme à Arezzo - Italie - Le 01-12 @ Rusnenta à Turin - Italie - Le 2-12 @ l'ONO BAR à Berne en Suisse - Le 4-12 à La Laiterie à Lausanne en Suisse


di Ahmed Amri
Beloved Comrade (EP)
Alle origini di Furia, un sogno rivoluzionario ed un po' utopista condiviso da due artisti belgi impegnati. Spodestare
la
musica sinfonica dalla sua vecchia torre d’avorio per farne, se non un'arte di massa nel senso pieno dell'espressione, almeno una cultura più accessibile al popolo, meno elitaria di ciò che non lo sia per tradizione.

Non si tratta di far decadere la sinfonia da musica sapiente, ma di promuovere altrove il "sapere" e cioè, alla base della piramide sociale. Dinamizzare la cultura popolare affinché ci si incorpori, a medio e lungo termine, una tradizione sinfonica e più in generale una tradizione artistica da cui sono esclusi oggi, e nella maggior parte dei paesi, le fasce più povere.
Un’impresa che, a prima vista, sembrerebbe una scommessa, se non fosse che il progetto di Furia è già stato ampiamente provato altrove. E da molto tempo.
In Venezuela, da più di 60 anni, El Sistema, un sistema nazionale di orchestre di giovani e bambini messe in piedi da José Antonio Abreu (1), ha permesso di far avvicinare e di far propria una cultura una volta riservata ad una casta a mezzomilione di bambini appartenenti agli strati più poveri.
Questi bambini sono oggi tra le migliori orchestre del mondo. E Mozart, Beethoven, Ravel... sono divenuti il pane quotidiano per queste generazioni formate da El Sistema. (2)
L'ambizione di Furia è di trasmettere il "contagio" di El Sistema all'Europa. Una lotta che è solo all’inizio e che merita di essere sostenuta non solo dai melomani, ma anche da tutti quelli che si battono per un mondo più giusto, più umano (3).

Pur investendosi in questa lotta d’avanguardia che si fa carico di diffondere, divulgare per quanto possibile la musica sinfonica, Furia si batte anche per un'arte sinfonica impegnata. Contro la concezione vecchia e meschina di "l'arte per
l'arte", contro queste teorie coltivate dall'ideologia dominante che vuole l'arte sterilizzata contro ogni tentazione, per non servire altro che il suo proprio "ombelico", Furia si batte anche per riabilitare i canti di protesta, di lotta.

Vorrei inviare un messaggio, la voce di un cittadino arabo, ai nostri Ministri della Cultura, ai Direttori di Festival, a tutti
coloro che sono a capo delle istituzioni culturali nel Mediterraneo, ma anche ai giornalisti, ai conduttori di spettacoli televisivi a tutti coloro che hanno a buon diritto voce nel capitolo della nostra cultura artistica :

Noi vorremmo vedere Furia a Cartagine, a Timgad, a Baalbek, ad Agadir.... e in tante altre scene di gran prestigio, quelle
che ci hanno fatto scoprire negli anni i talenti migliori del mondo.
Noi vorremmo vedere questo duo belga onorato a buon diritto dal pubblico arabo, dalle televisioni e dalle radio dei nostri paesi poiché, senza voler esagerare, questo duo onora la musica e la canzone concepita per servire da "rimedio alla malinconia che ci circonda"(4.)

Philippe Tasquin e Julie Jaroszewski ridonano all'arte sinfonica nuove lettere di nobiltà operando da un lato, a riprendere il lavoro iniziato in Venezuela da José Antonio Abreu, dall’altro a coniugare quest’arte alle giuste cause dei popoli, alle voci e ai modi di ogni cultura, la voce di quei cittadini che in ogni paese si battono per un mondo migliore.
Per la salute comune dell’umanità.
La salute di questa arte sapiente potrà soltanto arricchirsi e sbocciare a nuova cultura di massa mano a mano che saprà e potrà espandersi. 


Patrizia Donadello
16.11.2013


Traduzione dell’articolo di Amhed Amri : Furia: pour un art symphonique de masse



Notes:
1- Jose Antonio Abreu parlant des enfants transformés par la musique:

2-" Aujourd'hui, nous pouvons dire que l'art en Amérique latine n'est plus un monopole d'élite mais est devenu un droit social." (José Antonio Abreu)

3- Est-il besoin d'être plus explicite à ce propos pour indiquer les modalités de ce soutien?
Un artiste vit de ce qu'il produit pour autant que ses œuvres puissent bénéficier des conditions optimales qui en assurent la diffusion et la vente. Régis par les lois de la jungle capitaliste, les circuits de diffusion et de vente ne se prêtent pas à tous les produits ni ne s'accommodent des artistes qui refusent de marcher dans leurs passages cloutés.
Philippe Tasquin et Julie Jaroszewski font partie de cette catégorie pénalisée pour son intégrité artistique, qui ne se prostitue pas ni n'admet de faire barboter son talent dans l'auge du racolage, et que boudent justement les rentiers de la diffusion, plus proxénètes que véritablement promoteurs d'art.
L'humour noir de Philippe Tasquin à ce propos est éloquent: «On n’est pas censuré, souligne-t-il, on n’est juste pas diffusé !»

4- C'est l'ambition du duo belge, telle qu'on peut la lire dans une interview accordée à Camille Wernaers : « On veut que Furia soit un remède à la morosité ambiante ».


Quelques titres de Furia:

                                                             Les Coquillages

Sous-titrage arabe:


                                                                Mort d'une pute

Sous-titrage arabe:



                                                                   L'Estaque

Sous-titrage arabe:



La version symphonique de ces titres (+ trois autres) est disponible sur un CD que vous pouvez commander, moyennant 5 € ou plus, sur ce lien.

Pour contacter Furia.


dimanche 10 novembre 2013

Viens cogner ton verre contre la terre de Trapani

Bob Salmieri
Le Milagro Acustico Medina Sound, qui travaille depuis près de 20 ans sur le thème de la Sicile arabe, vient de sortir un CD dédié à cette mémoire couvrant pas moins de trois siècles, mais qui émerge à peine de l'amnésie collective: Sicilia Araba(2013).

Il faut rendre au
Milagro Acustico Medina Sound cette justice que ce n'est pas la première production du groupe à exhumer ce passé arabe sicilien. Et d'ailleurs, l'intérêt de cet ensemble musical dépasse largement le cadre restreint de la Sicile et son patrimoine arabe. C'est dans tout l'Orient des Mille et Une Nuits, ou presque, que l'ensemble s'est investi pour faire découvrir au public italien, entre autres Omar Al-Khayam et ses Quatrains, Nazim Hikmet et sa poésie de combat. 

Le présent disque
Sicilia Araba(2013) restitue à ce passé sicilien, à ces témoignages de poètes,
Photo M.A.M.S
historiens, explorateurs déjà chantés en italien la "voix" qui est la leur, la langue arabe. De même, l'orchestration et les arrangements du nouveau CD s'articulent autour de l'instrument musical arabe majeur qui est le luth. Par conséquent, il s'agit d'une offrande, belle et généreuse, à la fois au public arabe et(ou) arabophone et aux peuples et nations du bassin méditerranéen, au nord comme au sud dépositaires de ce passé commun, ce riche patrimoine qui, grâce
au Milagro Acustico Medina Sound et à tant d'artistes impliqués dans sa réhabilitation, ne risque pas de tomber en déshérence.
En guise de modeste hommage à tous les artistes et chercheurs qui travaillent dans ce chantier de mémoire commune, à Roberto Salmieri et l'ensemble musical qu'il dirige, ainsi qu'à l'ami Marwan Samer qui a traduit en arabe les textes italiens, voici trois titres de Sicilia Araba(2013), traduits en français, qui feraient sûrement plaisir aux nombreux amis de Marwan, parlant français et pas arabophones.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore notre ambassadeur d'art musical en Italie, rappelons que Marwan Samer est un chanteur irakien de mère tunisienne. A 15 ans, il a quitté l'Irak pour la Tunisie où il a poursuivi ses études musicales. Une fois ces études terminées, comme un Sindbad arabe des temps modernes, il n'a cessé de voyager entre la France, la Belgique et l'Italie.
Auteur-compositeur-chanteur, Marwan Samer est également un chercheur dans le domaine musical. Il est l'auteur d'un livre intitulé "La Création entre l'autodidactisme et l'académisme".



Sicile arabe
Il y a mille ans, au carrefour des civilisations et des continents, la Sicile arabe était une terre de tolérance et de fraternité interconfessionnelle. Elle était aussi une "Mecque d'agrément" où il faisait bon se souler de ses senteurs d'agrumes, saliver au fumet de ses nectars divins, avant de cogner dans la convivialité et la gaieté son verre. Boire et chanter. Ne jamais se soucier du temps qui passe. Et au besoin cuver son vin au pied d'un palmier. Ou d'un citronnier qui embaume de ses fruits mûrs!
La Sicile était aussi l'éden des amants: ses vergers, ses orangeraies, sa verdure et sa fraîcheur oasiennes offraient aux soupirants et leurs bergères, douillets et inviolables, des nids d'amour qu'on ne trouvait nulle part ailleurs.
Illustration à travers ces trois chants ci-dessous traduits.



  Douce terre de Trapani (Musique de Bob Salmieri)

Un message de fraternité interconfessionnelle comme on en a tant besoin par les temps qui courent.
 

Prospère est la douce terre de Trapani
Où musulmans concordant avec les chrétiens
l'église et la mosquée bâtis en harmonie
cohabitent comme de parfaits utérins

Au levant se rengorge hautain le djébel
On dit que les belles nymphes de la Sicile
Aux houris identiques sont d'un charme tel
Qu'Allah à Ses élus les attache dociles

Cette nuit de samedi la nouvelle lune
parue annonçant la venue de ramadan
les musulmans ont commencé le mois du jeûne
et nous en telle kermesse du saint croissant

Nous avons prié en face d'une chapelle
côte à côte avec tant de frères croyants
qui communient dans l'ardente foi des fidèles
Pour le salut des chrétiens et des mahométans

Que c'est beau de voir ici la tolérance
des chrétiens qui de près nous regardent prier
leur roi dit: que chacun prie la Toute-Puissance
Adorée par tous sous le nom qui lui sied

L'Omniscient en nos tréfonds sans voile voit tout
et jamais rien en Lui ne se dévoile à nous

Ibn Jubair (*)
Traduit  par A.Amri
10 novembre 2013



          Viens cogner ton verre (Musique de Bob Salmieri)

Bel hommage d'un poète épicurien à la Sicile de la joie de vivre.




Viens cogner ton verre
à ras bord plein de rubis
et bois avec nous
du matin jusqu'au bout de la nuit

bois et laisse-toi bercer
par la guitare à deux cornes
et les chants du temple

Il n'est de vraie vie
qu'en la bénite Sicile
émirat qui de ses  palais royaux
hauts  surplombe les césars

hagard s'arrête le voyageur
qu'il est splendide ce lieu
que Dieu de Sa prospérité a comblé
le printemps tisse de sa beauté
de magnifiques toges à ses jardins
que le soleil levant rehausse de saphirs
et d'émeraudes le soleil couchant
et quand les rayons du soleil
baisent la mer étale
de l'orient s'élève une brise
fleurant bon les arômes balsamiques


Abd ar Rahman Muhammad ibn Umar, alias al Butiri as Siqilli
(poète de la Sicile arabe - 13e)

Traduction A.Amri
10 novembre 2013




Il fait bon aimer sous la protection de Favara
(Musique de Bob Salmieri)





Faveur du Seigneur, tu as deux mers Favara
Et il n'est de voeu cher que ta terre n'exauce
Ton eau onctueuse en neuf ruisseaux se déverse
Et l'amour à leur confluent taille en plein drap

Sur les bords de ton chenal chante la passion
Et quand tes vergers rutilent de leurs oranges
Quelle féerie que de voir ces rubis de songe
Qui chatoient vifs et de nous prennent possession!

Le citron a la pâleur d'un amant rongé
par une nuit d'âpre langueur loin de l'amante
Tandis que les dattiers aux palmes ondoyantes
A Palerme s'enlacent sous la grosse ondée

Délurés tels amants qui s'accouplent debout
Cependant qu'à leurs pieds soupirants et bergères
S'abîment dans la discrète ombre bocagère
Dessus, dessous l'amour a toujours le bon bout

Favara, tes nids d'amour douillets, inviolables
Font de toi la patronne et l'éden des amants
Si je n'avais vu de mes yeux tes agréments
J'aurais dit que Favara est une pure fable

Abd al Rahman ibn al Abbas, al Trabanishi Traduction A.Amri
12 novembre 2013
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Notes:
* -
Mohamed Ben Ahmed Ibn Jubaïr (1144-1217) est un explorateur andalou pionnier de la littérature des voyages.
Sicile arabe XIIe
 Il a fait trois périples en marge de ses pèlerinages à la Mecque, au cours desquels ayant à chaque fois Grenade comme point de départ, il a pu explorer diverses agglomérations autour des ports où il faisait ses escales. Il consignait tout ce qu'il voyait de curieux sur ses "carnets de bord". Dont la fraternité interconfessionnelle qu'il a pu constater en Sicile au cours de son premier voyage.
Au 13e, cette île qui a fait partie de l'empire musulman durant 200 ans était conquise par les Normands. Mais les musulmans continuaient d'y vivre en parfaite entente avec les chrétiens. Terre hospitalière qui devait aux Arabes ce qui en fit sa prospérité, en particulier son ingénieux système d'irrigation ainsi que ses plantations d'agrumes et la culture de coton, la Sicile était aussi la première vitrine sur la méditerranée des richesses de la culture musulmane. La littérature, les sciences et les arts arabes constitueront le socle et le ferment de la renaissance européenne.



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Marwan Samer et la révolution tunisienne (sous-titrage fr)





 

 


vendredi 8 novembre 2013

Furia: pour un art symphonique de masse

Furia (Photo Furia)
Aux origines de Furia, un rêve révolutionnaire et quelque peu utopiste partagé par deux artistes belges engagés. Déloger la symphonie de sa vieille tour d'ivoire pour en faire sinon un art de masse au sens plein de l'expression, du moins une culture plus accessible au peuple, moins élitiste qu'elle ne l'est par tradition. Il ne s'agit nullement de faire déroger la symphonie à son rang de musique savante. Mais de promouvoir le "savant" ailleurs, c'est-à-dire au pied de la pyramide sociale. Dynamiser la culture dite populaire pour que s'y incorpore, à moyen et long terme, une tradition symphonique, et artistique en général, dont sont exclus aujourd'hui, et dans la plupart des pays, les milieux défavorisés. Voilà une entreprise qui, de prime abord, pourrait ressembler à une gageure. Sauf que le projet de Furia a déjà fait ses preuves ailleurs. Et de longue date.

Au Venezuela, un système national des orchestres juvéniles et infantiles (El Sistema), mis en place depuis plus de 60 ans par José Antonio Abreu (1), a permis à près d'un demi million d'enfants appartenant aux couches démunies de s'approprier cette culture autrefois réservée à une caste. Ces enfants sont aujourd'hui parmi les meilleurs orchestres du monde. Et Mozart, Beethoven, Ravel...sont devenus des denrées de première nécessité dans l'entourage des générations formées par El Sistema.(2)

L'ambition de Furia est de transmettre la "contagion" d'El Sistema à l'Europe. C'est un combat qui ne fait que commencer. Et il mérite d'être soutenu non seulement par les mélomanes, mais aussi par tous ceux qui se battent pour un monde plus juste, plus vivable(3).



Beloved Comrade (EP)
Il faut rappeler aussi que, tout en s'investissant dans ce combat avant-gardiste qui postule à vulgariser, populariser autant que possible la musique symphonique, Furia se bat aussi pour un art symphonique engagé. Contre la conception vieille et étriquée de "l'art pour l'art", contre ces théories cultivées par l'idéologie dominante et voulant que l'art soit aseptisé, stérilisé contre la tentation de servir autre chose que son propre "nombril", Furia se bat aussi pour réhabiliter les chants de protestation. Les chants engagés.

Avant de conclure cette modeste présentation de Furia, je voudrais adresser un message, en vérité l'expression d'un vœu de citoyen arabe, à ceux qui sont à la tête des institutions culturelles sur la rive sud de la Méditerranée. Nos ministres de la culture, nos directeurs de festivals. Mais aussi les plumes journalistiques, les animateurs de plateaux télévisuels, celles et ceux qui ont voix (et droit) au chapitre dans  la cuisine de notre culture artistique.
On aimerait voir Furia à Carthage, à Timgad, à Baalbek, à Agadir... Et sur tant d'autres scènes aux noms auréolés de prestige, lesquelles nous ont fait découvrir au fil des ans les plus beaux talents du monde. On aimerait voir ce tandem belge honoré à bon droit par le public arabe, par les télés et radios de nos pays, comme le tandem honore lui-même, sans fioriture aucune, la musique et la chanson conçues pour servir de "remède à la morosité ambiante"(4).

Philippe Tasquin
Philippe Tasquin et Julie Jaroszewski redonnent à l'art symphonique des nouvelles lettres de noblesse, d'une part en œuvrant à reconduire chez eux le travail initié au Venezuela par José Antonio Abreu. D'autre part en faisant épouser cet art les justes causes des peuples, les voix et voies nôtres de citoyens de tous pays se battant pour un monde meilleur. Pour le salut humanitaire commun. Tout autant que le salut de cet art savant qui ne pourra que s'enrichir et s'épanouir au fur et à mesure de sa vulgarisation comme nouvelle culture de masse.





A.Amri
8 novembre 2013

Traduction en italien de Patrizia Donadeldo

Notes:

1- Jose Antonio Abreu parlant des enfants transformés par la musique:

2-" Aujourd'hui, nous pouvons dire que l'art en Amérique latine n'est plus un monopole d'élite mais est devenu un droit social." (José Antonio Abreu)

lundi 28 octobre 2013

Testament d'une péripatéticienne (Grisélidis Réal et Furia)

"L'art n'a que faire des lisières, des menottes, des bâillons; il vous dit : Va ! et vous lâche dans ce grand jardin de poésie, où il n'y a pas de fruit défendu." (Victor Hugo - Préface des Orientales)


Mort d'une pute est un poème écrit quelques semaines avant la mort de son auteure. Ce chant de cygne au titre provocateur, d'aucuns diraient scabreux, se lit comme le testament spirituel d'une écrivaine pas comme les autres.Une écrivaine qui était aussi "une courtisane révolutionnaire".

Le 17 avril 2005, dans une clinique genevoise où elle était hospitalisée, Grisélidis Réal -qui se battait depuis plusieurs années contre un cancer de l'estomac- se savait perdante, mourante. Et elle écrivit, la nuit (comme elle l'a mentionné elle-même en bas de la feuille encrée) ce poème à travers lequel, revendiquant jusqu'au bout son statut de pute invétérée, elle semblait narguer la mort et ses affres. Tout en formulant, dans un langage simple et poignant, ses derniers vœux. Les vœux pieux d'une "catin révolutionnaire et briseuse de tabous"(1).

Écrivaine suissesse, poétesse, peintre, Grisélidis Réal a "choisi" d'exercer parallèlement le plus vieux métier du monde. Certes dans un contexte biographique qui donne leur sens aux guillemets flanquant ce participe. Une mère célibataire ayant à sa charge 2 enfants, puis bientôt 4, de pères différents, et de surcroit indifférents au sort de leurs progénitures, si elle en vient à manger de ce pain-là ce n'est pas de gaieté de cœur, on l'imagine aisément. Mais parce que l'instinct de survie a ses raisons que la rigueur de la morale bien pensante n'a pas.

Certes, la catin s'est "institutionnalisée" par la suite. Allant jusqu'à abjurer la "vertu" à quoi on a tenté de la reconvertir, le prix de cette conversion, modique, ne valant pas la messe. Certes, à maintes occasions elle s'est inscrite en faux contre tant de clichés "fatalistes", ou candides, qui font de toutes les prostituées des victimes, des poules aux œufs d'or asservies par leurs maquereaux. Certes, la catin aurait bien aimé "valoriser" la profession, sinon faire en sorte que ce métier qu'elle définit comme  «un art, un humanisme et une science»(2) soit moins méprisé par la société humaine. Par ses puritains impénitents surtout. Certes, allant à rebours de tous les tabous vieux et si tenaces, bousculant les garde-fous de toutes nos doxas (in)humaines, la catin aurait bien aimé que le monde reconnaisse à ses ouvrières du sexe les mérites du métier, ses bienfaits et leurs droits, comme tout humain, au respect et à la dignité.

N'empêche que loin de toute complaisance et tous faux-semblants, cette catin est un peu comme la fleur de lotus sacré. Le nénuphar dont feuilles et pétales servent de trône aux divinités de l'Orient. Malgré la boue dont se nourrit la plante, le marécage dans lequel elle pousse et s'épanouit, le plus pur des hommes ne saurait rester indifférent à sa beauté. Ni à l'ascendant mystique des divinités païennes qui la protègent.

C'est dire quel plaisir fut pour l'auteur de ces lignes de redécouvrir "Mort d'une pute" chanté par Furia.
Furia (Photo Furia)
Car en toute franchise, tel auteur aurait été incapable de "dédouaner" dans sa tombe la "poétesse maudite", pour traduire en arabe son "vœu testamentaire", sans le talent et le courage de ce duo belge qui a sanctifié la pute par la magie de l'art. Le pouvoir de ce piano ensorceleur (Philippe Tasquin) et la non moins ensorceleuse voix de sirène qui l'accompagne (Julie Jaroszewski), le talent de ce tandem de "furies" se battant sur plus d'un front pour que notre monde soit vivable, l'art sublime honorant si bien la chanson et l'engagement, autant de raisons plaident pour que Mort d'une pute soit "entendu" en arabe, comme la cause de la péripatéticienne qui a "couché" sur une part de son testament les indignés de l'humanité.



A.Amri
28.10.2013



Notes:
1- Françoise Courvoisier: Grisélidis au théâtre: un paradoxe en or.
2- Interview de
Grisélidis Réal sur RTS, par Pascal Rebetez.

mercredi 28 août 2013

La guerre des Trois Coquins et leur cheval de Troie

Ils sont décidés à nous la faire, leur guerre de Trois.

En braves redresseurs de torts faisant valoir à bon endroit, comme chaque fois, comme toujours, leur droit d'ingérence salutaire, l’infaillible bouclier des innocents humains.
Mousquetaires au secours des Syriens que le sarin menace, nobles, désintéressés, philanthropes n'ayant d'autre fin que la protection des faibles, le soutien des opprimés, le bonheur de l'humanité.

Et d'ailleurs qui osera les contredire là-dessus, ces philanthropes patentés? l'histoire, en maintes occasions et lieux, ayant prouvé combien ces braves justiciers occidentaux ont très bien servi l'humanité chaque fois que celle-ci, en détresse, les a vus accourir à son secours. Sans que cette humanité ne le leur demande, au reste.
N'a-t-on pas sous les yeux les mille et un bienfaits de ces charitables mains tant de fois tendues aux damnés de la terre, les exploits sans nombre de ces d'Artagnans invétérés dévoués au service de la justice au monde, les bilans, en tout lieu brillants, de chacune de leurs croisades contre le terrorisme, les États voyous, la barbarie?
Libye, Irak, Afghanistan, pour ne citer que les plus récents terrains de leurs interventions: mesurez ce que les peuples secourus dans ces trois pays ont acquis grâce aux sauveteurs de l'humanité et leurs épées secourables: prospérité, liberté, sécurité, dictatures enterrées et démocraties, démocraties naissantes -cela va de soi, mais sur la bonne voie, sous peu qui n'envieront rien au meilleur modèle occidental. Eh oui! qui n'en conviendra?

Ils sont décidés à nous la refaire, leur guerre de Trois.

Juste pour sortir les Syriens, assurent-ils, de ce détroit noir qu'infecte le sarin. D'autant que de l'autre côté du détroit, leur Hélène, israélienne et polyandre, se trouve elle aussi sous l'épée de Damoclès-Sarin-le-Syrien. Nonobstant ses têtes nucléaires, son phosphore blanc à gazer les acariens basanés de Gaza, ses boucliers étasuniens et son armada de 4e puissance militaire au monde, la pauvre Hélène est constamment à la merci de l'ogre irano-syrien. Uranio-sarin. Aussi espère-t-elle à bon droit conjurer par cette nouvelle guerre contre les méchants voisins arabes l'ogre épouvantable qui trouble à juste titre sa sérénité. Et gagner par la même un nouveau tronçon de terrain déminé et désinfecté, afin d'aérer davantage son espace vital, sécuriser toujours mieux les parages de sa maison, parages incessamment peuplés de démons incorrigibles, incivilisables, impénitents.

Pour le pas d'Hélène cher à la mesure des géomètres et la démesure des maîtres de ce monde, la guerre de Troie aura lieu. Et tant mieux pour les armuriers, les pauvres armuriers et marchands d'armes, qui, au passage, n'ont plus rien à se mettre sous la dent ces derniers mois, et pour cause! La philanthropie sauvera la Syrie, oui, mais sans pour autant oublier les prochains de ses apôtres, les bons apôtres de la philanthropie.

La guerre de Troie aura lieu. Et il y aura toujours parmi les Troyens arabes et musulmans des écuyers zélés au service des chevaliers servants d'Hélène! Et tout autour de ces écuyers, non moins zélés ni dévoués à la polyandre et ses amants, des serins béats pour nous seriner, dans la communion des saints islamo-siono-atlantistes, la belle sérénade du Printemps arabe qu'on verra bientôt fleurir pour de bon.

De Damas à Tétouan. Inch'Allah !

A.Amri
28 août 2013

jeudi 22 août 2013

Tahar Ben Hassine, l'irréductible voix de la révolution

Dans un cri de détresse publié hier en fin d’après-midi sur sa page fb, Tahar Ben Hassine prévenait ses amis, ses téléspectateurs et le peuple tunisien que la police encerclait le siège de sa chaine de télé, dont les locaux se situent à Manouba.
«Les agents qui encerclent le siège, écrit-il, en dehors des heures administratives, vont m'arrêter et me conduire à Gorjani. Ma recommandation consiste à ne pas changer de combat: n’appelez pas pour ma libération mais continuez à œuvrer pour la dissolution du gouvernement».

Directeur de la chaîne de télévision privée El Hiwar Ettounsiقناة الحوار التونسي (Le Dialogue tunisien), Tahar Ben Hassine est connu par les téléspectateurs tunisiens depuis 2003, date de lancement d'El Hiwar, comme un militant de première ligne, infatigable, pionnier de l'engagement audiovisuel national, qui se bat sans répit ni compromis pour la liberté, la justice et la démocratie. Ayant pour devise, qui est aussi le slogan de sa chaine: « la liberté de parole est le fondement de la liberté de la patrie », Tahar Ben Hassine a participé à toutes les batailles sociales et politiques marquant la dernière décennie. Les mêlées pour sa survie de la LTDH (Ligue tunisienne des droits de l'homme), les grèves de la faim -en 2005 puis en 2007- d'opposants politques, la révolte du Bassin Minier, puis celle de Ben Guerdane, la Révolution: tous ces temps forts de notre récente histoire nationale, Tahar Ben Hassine les a couverts, et courageusement, à un moment où la presse et les médias tunisiens étaient bâillonnés.

Ce combat qui a valu à Tahar Ben Hassine un harcèlement continu de la part du président déchu Ben Ali, reconduit avec la même intensité après la révolution de 2011, met aujourd'hui le militant dans le collimateur du nouveau pouvoir tunisien.
A la mi-juillet dernier, sur instigation du président provisoire Moncef Marzouki, le ministère public a accusé

Tahar Ben Hassine d’incitation à la désobéissance civile. Convoqué par la Brigade criminelle de Gorjani pour une audition fixée au mardi 20 août, Tahar Ben Hassine ne s'est pas présenté, invoquant des problèmes de santé. Mais son avocat ayant obtenu entretemps le report d'audition au 9 septembre prochain, le débarquement de la police chez Tahar Ben Hassine, dans son domicile ou aux locaux de sa chaine, son arrestation ou une menace de tel ordre (car pour l'instant on ne sait pas encore si l'arrestation a eu lieu) procède d'un flagrant abus de pouvoir inacceptable. Cet arbitraire policier qui rappelle les vieilles méthodes de répression dictatoriale nous interpelle en tant que citoyens libres.

Citoyens tunisiens et citoyens du monde, Tahar Ben Hassine est notre voix irréductible, insoumise, incorruptible. Et sa chaine de télévision est le canal inconditionnel de notre peuple, la tribune libre de notre révolution.
Dénonçons tous d'une seule voix la répression du pouvoir tunisien qui renoue avec la dictature de fer benalyenne! Non au bâillon visant la liberté d'expression, la liberté de la presse, la liberté de l'information! Non à la muselière de la censure! Nous sommes tous Tahar Ben Hassine et El Hiwar Ettounsi !

A.Amri
22 août 2013

samedi 17 août 2013

Syrie: massacre de chrétiens à Marmara et Kalat Al-Hosn

Au lendemain même de la formation en Turquie de la Coalition nationale syrienne (CNS) il y a deux ans, le vice-président de cette coalition Farouk Tayfour, qui est en même temps le guide de la confrérie des Frères musulmans en Syrie, appelait les brigades de l'internationale islamiste engagées dans son pays à frapper les quartiers habités par les minorités, entre autres nassirites et alaouites, considérées pêle-mêle comme les inconditionnelles alliées du régime. Depuis, les civils chiites et chrétiens sont incessamment la cible de massacres perpétrés par la soi-disant ASL (Armée syrienne de libération) et ses alliés les troupes jihadistes de Nosra et Al-Qaïda.

Les USA, certains pays de l'UE et les pays arabes qui ont adoubé cette coalition syrienne, qui soutiennent sa "révolution" armée, lui fournissent des combattants, l'assistance logistique et jusque les recrues vouées au jihad de niqah, sont tous complices des crimes contre l'humanité endeuillant au quotidien depuis deux ans la Syrie.

Ce matin à l'aube, une nouvelle boucherie a été perpétrée dans deux zones voisines à l'ouest syrien: Marmara et Kalat Al-Hosn (Krak des Chevaliers). Au moins une dizaine de chrétiens syriens, jeunes pour la plupart, ont été tués dans l'attaque de leur région par les hordes jihadistes. Parmi ces martyrs, on a pu identifier: Jacques Saâda, Sumer Issa Yezji, Fedi Elyes, Bassel Watfa, Atallah Aboud, Amin Nagrour, Ibrahim Saâda et Maria Berchini (couple figurant sur la photo). Et ce bilan qui n'est pas définitif risque de s'alourdir encore, hélas, dans les heures qui viennent.


A.Amri
17 août 2013


Quand les médias crachent sur Aaron Bushnell (Par Olivier Mukuna)

Visant à médiatiser son refus d'être « complice d'un génocide » et son soutien à une « Palestine libre », l'immolation d'Aar...