vendredi 5 avril 2013

Okamoto - Mokhtar Laghmani (Traduction)

Mokhtar Laghmani, l'étoile filante de la poésie tunisienne,  avait conçu ce poème alors qu'il devait avoir juste 20 ans.
 
En cet été de l'an 1972, après l'attaque de l'aéroport israélien du Lod1, le 30 mai, par un commando de 3 étudiants nippons appartenant à l'Armée rouge (JRA), s'est ouvert, le 12 juillet à Tel-Aviv, le procès de Kozo Okamoto, l'unique rescapé dudit commando. Et alors qu'un tribunal militaire jugeait ce survivant, les médias arabes -tant au Machreq qu'au Maghreb, ne cessaient de rendre hommage au brave internationaliste rouge ainsi qu'à ses deux compagnons morts, qui avaient quitté familles, pays, université et douceur de vie pour servir en terre arabe un idéal révolutionnaire.
 
Mokhtar Laghmani, alors jeune étudiant et poète communiste2, ne pouvait que saluer à son tour ces fedayins de sang non arabe, venus, si prodiges d'amour pour la cause palestinienne, du « pays du Soleil-Levant » . D'où ce poème intitulé "Je t'aime Okamoto".
 
 
 

Je t'aime Okamoto
Je t'aime ô l'humain frère
Nonobstant vétos muftitiques
A la fraternité interconfessionnelle
Mais qu'importe si l'on ne t'a pas seriné le Coran!
Qu'importe si tu n'es pas de la Nation élue!
 

 

[C'est que dans notre sang commun à nous]
Quand les volcans conçoivent
Fondent toutes les races
Tombent toutes les religions
C'est ainsi qu'ont déchu
Toutes les couronnes 
Que sont morts
Les héros byzantins
Et leurs pairs hellènes
De même Antar
3
Et Ali Ben Sultan4
 
Tous les héros sont morts
Mais demeure l'humain






Mokhtar Laghmani (milieu des années 70)

Traduction Ahmed Amri
05.04.2013





==== Notes ====

1- Rebaptisé à partir de décembre 1973 "Aéroport international David-Ben-Gourion"
 
2- Poète arabe pré-islamique du VIe siècle, réputé pour l'amour qui l'attachait à Abla: amour impossible, le poète étant fils d'esclave noire. Antar était réputé aussi pour sa bravoure de chevalier.


3- Héros d'un conte de la tradition orale.
 
4- Né à Zarat en 1952, et mort à Tunis à l'âge de 25 ans en 1977, Mokhtar Laghmani est le neveu du poète Ahmed Laghmani, Il avait toutefois choisi une voie diamétralement opposée à celle de son oncle, étant engagé à gauche, aussi bien politiquement parlant que sur le plan purement esthétique. Mokhtar fait partie des pionniers du vers dit "non-métrique et non libre". 
 Après des études primaires à Zarat, Mokhtar rejoint le Lycée de Gabès (l'ex-Manara qui regroupait l'actuel Abou Loubaba et Al-Manara) et obtient son baccalauréat en 1972. En 1976, il obtient une licence ès lettres arabes. A peine nommé professeur au lycée de Testour en 1977, il meurt (deux mois après) des suites d'un ulcère chronique. L'ensemble de ses poèmes a été publié de façon posthume dans un recueil intitulé «أقسمت على انتصار الشمس» - الدار التونسية للنشر - تونس 1978 (littéralement: J'ai juré que le soleil vaincra).






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