vendredi 16 juillet 2010

A Mordechai Vanunu: lettre de ses compatriotes (I)






Dix-huit ans en prison dont onze dans l'isolement total, puis trois mois encore, entre-temps toutes les contraintes de l'assignation à résidence, l'infamie subie au quotidien de celui qui passe pour un traître, sur sa terre d'exil , et qu'on traite en paria, les menaces de liquidation physique projetée par le passé au niveau des agents du Mossad et pouvant l'être encore au niveau de ceux qui ne le jugent pas moins méritant que Rabin, assassiné en 95: tant de hargne contre cet objecteur de conscience (1) -que l'État hébreu n'est pas près de faire descendre du pilori- interpelle la conscience de tout homme digne de ce nom. Cette injustice criante est intenable. Il est temps, grand temps pour tous ceux qui se sentent concernés par cette longue Passion, de réagir.

L'Occident peut-il faire mieux?

L'auteur de ces lignes conviendra qu'en ce qui lui incombe dans cette affaire, l'Occident n'est pas resté indifférent. Loin de là, il aurait fait même beaucoup. Mais beaucoup et bien ne sont pas des synonymes. On reconnaît l'encre qui a coulé et ne cesse pour fustiger l'injustice et demander que Vanunu soit autorisé à quitter Israël. De nombreuses initiatives ont été faites, et largement médiatisées, pour tenter de faire desserrer autour du cou de son porteur le carcan de barbarie. Sans compter les honneurs qui ont été prodigués à l'homme, tant par des universités de grande notoriété que par des fondations et des associations humanitaires. Même au plan affectif, il y eut des âmes charitables pour adopter le fils renié par une partie de sa famille. En somme, l'Occident n'a pas réussi à faire une percée du côté de l'État sioniste mais il ne cesse de couver des yeux le martyr. Alors que pourrait-il faire de mieux?

De mieux: cet Occident peut faire ce qui brisera le fer du carcan!
Dès qu'il comprendra qu'en l'étreignant si fort dans ses bras, le bourreau se gausse de l'insulte qu'on lui souffle dans l'oreille, ou à cor et à cri, en même temps que du doctorat honoraire ou du Nobel alternatif décernés au paria! Comme de tout le bataclan, du reste. Et d'un.

Et de deux: dès que l'Occident aura compris ce qui précède, qu'il arrête de soutenir le bourreau! C'est simple, clair et facile à comprendre dans toutes les langues.
Le seul moyen de sauver Mordechai Vanunu est de tendre nos mains réunies, de tous pays, avec le grappin à mettre, solide et déterminé, sur la main du bourreau. En deçà d'une telle initiative, concertée mais on ne peut plus urgente, nous ne ferons que nous griser les uns les autres, de l'encens agité ça et là et qui risque d'occulter davantage les chaines, quand bien même il honorerait l'enchaîné.

L'argent est le nerf de la guerre (2). Le vieux sage qui l'a dit ailleurs -à bon droit et endroit le redit ici. En boycottant les produits qui viennent d'Israël, code barre 729, et en proclamant que nous le faisons pour le paria, en boycottant les agences touristiques d'Israël, et en proclamant que nous le faisons encore pour le paria , en boycottant BHL, Charbit, Sarko, Strauss-Kahn et Cie (3), et en proclamant que nous le faisons pour le paria, en nous rassemblant dans des sit-in, cet été, devant les ambassades d'Israël avec des pancartes appelant au boycott de ce pays, et en proclamant que nous le faisons pour le paria, nous verrons fléchir non seulement la main du bourreau mais ses mâchoires, et tout le corps acculé à la déroute inéluctable.

Quand Israël comprendra ce qu'il peut lui en coûter d'être sourde aux cris de l'humanité, nous aurons déjà gagné cette partie.
Et Mordechai Vanunu sera redevable de son salut aussi bien au consommateur averti qui trie avant de faire ses emplettes qu'à l'intellectuel qui le précède ou le complète par son écrit .
Et les Arabes?

Il y a un an à peu près, au cours d'une interview accordée à une chaîne de télé arabe, Mordechai Vanunu a lancé un vibrant appel aux chefs d'états, arabes entre autres, de lui accorder un passeport, et le plus tôt possible, pour qu'il puisse quitter l'enfer.
Même si le document demandé ne suffirait peut-être pas à exaucer le vœu de cet homme, il est du devoir de ceux qui pourraient faire quelque chose dans ce sens de répondre à l'appel. Les amis d'Israël de par le monde, mais aussi ses "amis" dans la région devraient se disputer l'honneur de faire rapatrier, coûte que coûte, le plus noble des dissidents.
Majestés, Éminences, Excellences,
Si certains d'entre vous sont accrédités à Tel-Aviv et, n'en déplaise, ils le sont sans notre consentement, avec notre consentement et assentiment réunis autour de Mordechai Vanunu- que ceux qui ont des ambassades en Israël volent à Tel-Aviv et demandent en leur nom ou le nôtre, peu importe, la rédemption de notre frère!

J'en appelle à la conscience des hommes où qu'ils soient pour en prendre acte.

Gabès, le 03.07.2010




Cher Mordechai,

L'eau et le sel n'abjurent pas ceux qui les ont partagés.
Pour peu que ce cri soit entendu, que d’autres voix le relayent. Que s’y reconnaissent et secouent le carcan ceux qui refusent l’institution de la calomnie, du puritanisme à quelque niveau soit-il, de la chasse aux sorcières. Pour peu que l’objection de conscience mobilise ses défenseurs, que le cloué au carcan de la plus noble des dissidence ne soit pas seul dans cette bataille, que d’autres, plus nombreux et déterminés, le rejoignent en deçà du mur comme au-delà.

Pour peu que la raison des hommes l’emporte sur celle de l'État, que les barbelés, les checks-points, la clôture de sécurité et la hargne daignent accorder à ce cri une passerelle, un créneau. Pour peu que la Prison (4) veuille entrebâiller sa porte et, scellant à jamais la bouteille de ses démons, condescende à te bouter hors de ses frontières, tes amis d'ici et de tous pays, ta patrie natale et toute la terre, tes frères arabes et ceux du monde entier seront là où tu voudras pour te souhaiter la bienvenue.

Tu n'avais que neuf ans lorsque tes parents, bernés par les bons apôtres, t'ont ravi à ton pays en même temps qu'aux tiens.
Sans quoi tu ne serais pas là où tu es maintenant (5), ni n'aurais besoin que je t'appelle de si loin pour te dire : tu nous manques terriblement, frère!

Alors, s'il y a une chance pour toi de leur réchapper, une chance de sortir indemne de l'enfer, n'oublie pas ceci: ici toutes les maisons sont les tiennes.

Je te sais hanté de ces années dont personne ne guérit. Ce cordon qu'on croyait sectionné, et tu sais de quoi je parle, est toujours intact. Il n'a pas besoin d'être ressoudé. Tu te souviens de cette enfance qu'on voulait te confisquer. Du lait partagé d'avant le sevrage. Tu t'en souviens comme si c'était d'hier, comme si c'était d'aujourd'hui.

Et pourtant, quand la nuit carcérale daigne te laisser à ta solitude, que celle-ci te lâche après les souvenirs, quand tu tentes d'évaluer le chemin parcouru, que tu comptes murs, murailles, vallées, montagnes, plaines, rivages puis les mers, à quoi ajouter le demi siècle d'exil, tu ne peux que détourner la tête.

De peur que le vertige ne te trahisse. Et surprenne l'éclat opalescent de tes yeux.

Que d'années perdues depuis qu’ils t’ont ravi au Maroc! A l’Afrique du Nord où partout ce sont les tiens. Je ne parle pas de Georges, ni de Yahya, ni d’Abraham ni de tant et tant d’autres encore que tu connais. Ceux-là, vivants ou morts, refuseraient que je les détache des Ali, des Mohamed et des Fatma. Ou de tout autre prénom communautaire inscrit sur les registres de notre état civil. De Tripoli à Tanger, en passant par Gabès et Constantine, et de si loin que se souviennent les hommes, jamais la terre n’a renié ses enfants. Ceux-ci non plus d’ailleurs. A part ceux qu’on a pipés, dupés au nom d’un idéal dont on sait les conséquences. Et que beaucoup du reste, sitôt débarqués sur la terre sans peuple, l’ont sans ambages abjuré. Même les autres, ceux qui, aliénés, croient encore aux vertus de cet idéal, même ceux qui, faits et devenus rouage du système, ceux qui campent par la loi du feu et du sang sur la terre volée ou squattent dans les maisons dont ils ont chassé les propriétaires, quand quelqu’un leur rappelle les cafés de Sidi Bou-Saïd ou d’Oran, la médina de Tunis ou les souks d’Alger, un point d’attraction quelconque surgissant d’on ne sait où pour les désarçonner, déboussolant un moment leur aveuglement et rendant au cœur ses artères, diraient : « Oh, oui, ouhak rabbi ! c’était bladi!» (6)

Mais toi, Mordechai, c’était une autre histoire, et un déboire tout autre.

1963, en ce jour « J » que les tiens auraient marqué en gras depuis quelques ans seulement pour partir. Les parents et les plus petits d’abord, et toi avec(7). Et le reste qui suivra.

Quand tes parents faisaient leurs valises, que tes aînés s'affairaient entre les chambres et que ta maman te criait de lui passer ceci ou cela, tu étais déjà à dévaler les escaliers, essoufflé, ou loin de la maison, remontant puis descendant les venelles, avec quelque chose de brûlant dans les yeux. Qui te voilait le soleil de Marrakech. Et ce cœur gros, ce gros nœud au gosier qui t'empêchait de respirer.

Jamais. Au grand jamais tu n'as oublié Fatima, Yahia, ni Abdellatif et Jocelyne. Ni Mohamed ni Abraham et George. Infimes graines dans le long chapelet des utérins. La smala du quartier. Les voisins, les frères et sœurs avec qui tu as partagé l’eau et le sel. Les camardes de jeux, les commerçants de ta rue, les amours précoces, transies et candides. Ni tout ce que tu as laissé derrière les murailles et les mers. Et qui n’a jamais cessé de t’appartenir, Mordechai.

Ces braises inextinguibles que tes ravisseurs voulaient éteindre. Que tu as constamment couvées au plus profond de ton cœur. Pour qu’à jamais la brûlure transperce les cendres. Et te garde à la terre natale, envers cabale de ravisseurs et mandataires, fortement soudé.

Jamais. Au grand jamais tu n’as oublié les artères qui mènent au cœur. Enchevêtrées. Les lignes et courbes sinueuses guidant la géométrie de tes fugues. La médina et ses anses. Tes errances d'enfant prodigue. Ni Tachfine ni Sofia ni les parfums du jardin Majorelle. Ni Jamaâ El Fna qui te tambourine à même les tympans, les herbes fleurant bon des narguilés, étourdissant serpents et leurs dompteurs sur l’immense place où il faisait bon t'égarer. Les jongleurs qui ravissent aux touristes leurs yeux et sous, l'enfant qui se hisse sur la pointe des pieds pour te rappeler, l’encens qui moutonne, t’aveugle et LE suffoque. Ni, tout autour des yeux, les moites guirlandes de lampes qui dansent.

Comment oublier tant d’images associées à tes racines, comment oublier ton Maroc, comment te défaire de ce parfum de la mère dont tu as prodigieusement arrosé chaque pli et repli de ta valise, au moment où tu as su enfin que les dés étaient joués ?

Ces myriades d'étoiles qui se bousculent dans la mouvance de la mémoire, gaufrées à même la prunelle, ces novæ qui peuplent tes rêves, ces lucioles qui voltigent à même les cils et hantent depuis l’éternité ta terre d’exil, jamais tu n’as pu t’en détacher.

Et puis tu as grandi.

Et il t’a fallu composer avec l’inconfort de cet état d’orphelinat. Sur la terre ravie qu’on voulait greffer en amont des racines, il t’a fallu te plier un moment au mektoub. Ou plutôt juste faire avec. En attendant l’opportunité de te défaire de ce ralliement forcé, le moment de leur balancer leurs quatre vérités à la face. Et reprendre en main ta destinée.

1982, la date butoir.

Il t’a fallu non pas un alibi pour te démarquer de cette fausse mère, la catin qui t’a serré enfant contre sa poitrine pour t’abuser. Et te baiser. Sauf ton respect.

Mais la RAISON. La preuve infamante, irrécusable de leur barbarie.

Quand tu as vu les crimes des sionistes au Liban, que Beyrouth fut livrée à ses assassins par Sharon, que la Shoah et l'Holocauste, les vrais, étaient l’œuvre de ces bons apôtres qui avaient enrôlé tes parents, que le sang versé à Sabra et Chatila rejaillirait fatalement sur quiconque le voit et ne fait rien pour l’arrêter ni le venger, tu ne pouvais plus aller plus loin.

Le jour même que les images de l’horreur sortaient de Beyrouth et commençaient à se répandre à travers le monde entier, tu as abjuré David et son étoile (8). En signe de purification. Et le Mur occidental et le Temple (9). De même que Jérusalem-Ouest (10) et tous les lieux infestés par les criminels. Juré, tu l'avais juré que la violence du peuple palestinien était légitime. Que le terrorisme prêté aux fedayins était un mensonge. Et qu'il était urgent de rendre à tes singes leur monnaie! La catin qui t'a baisé, enfant, devait l'être à son tour par l'homme!


(A suivre)

Gabès, 14 juillet 2010.

1- Exemple parfait de citoyen du monde, en dehors d'Israël Vanunu est reconnu à l'échelle planétaire comme tel. Il a agi dans le cadre de la désobéissance civile et dénoncé le danger que représente non seulement pour la région, y compris Israël, mais pour le monde entier, l'arsenal nucléaire israélien Les associations de défense de droits de l'homme, des institutions académiques internationales, la Fondation altermondialiste "Prix Nobel Alternatif" ont reconnu le mérite et le courage de Mordechai Vanunu, récompensé à maintes reprises.

2- Proverbe latin (la sentence est attribuée aussi à Cicéron).

3- Après avoir purgé 18 ans de prison, depuis sa libération en 2004 Mordechai Vanunu est assigné à résidence et interdit de quitter Israël. De 2004 à ce jour, il a été interpellé 22 fois par la justice pour non respect des restrictions qui lui sont imposées (défense d'avoir des contacts avec des étrangers et de sortir de Jérusalem-Ouest) Le 24 mai 2010 Mordechai Vanunu a été renvoyé en prison pour 3 mois. Il devrait être libéré le 23 août prochain. Mais libéré ne veut pas dire libre. Ce qui justifie la majuscule ici: seule l'autorisation à quitter ce pays (avec affranchissement de toute poursuite à l'extérieur par les agents du Mossad) permettra à Mordechai Vanunu d'être enfin libre.

4- Il va sans dire que les quelques noms donnés ici ne sont qu'un grain dans le chapelet. Ci-dessous une liste dressée par le journaliste militant José MOVIDAS RUBIO qui concerne quelques entreprises finançant l'État sioniste.
http://www.legrandsoir.info/Boycottons-les-collabos-de-l-etat-sioniste.html


5- Selon l’édition en hébreu d’Ynet daté du 13 Juin, Mordechai Vanunu, placé dans une prison sous haute surveillance, vit dans l’isolation totale au point même que personne, pas même le commun des geôliers ne savent où le localiser. Il pourrait bien être ce Mr X à propos de qui on lit : « Personne ne sait qui est Mr X. Ynet a appris qu’un homme avait été emprisonné depuis un certain temps dans l’aile 15 à la Prison Ayalon mais personne ne sait qui il est et quelles sont les chefs d’inculpation pour lesquelles il est emprisonné. Personne ne lui parle, personne ne le voit, personne ne lui rend visite, personne ne sait qu’il est en prison. Il a été mis dans une situation de séparation complète du monde extérieur »

6- En arabe : « Pardi ! c’est mon pays ! »

7- La famille nombreuse (composée des parents et leurs 12 enfants) s'est divisée en 2 groupes pour effectuer l'émigration. Mordechai Vanunu et 4 frères accompagnés de leurs parents constituaient le premier groupe.

8-
La crise de foi que Mordechai Vanunu a vécue à cette époque le conduira en un premier temps vers le bouddhisme, puis à se convertir au christianisme au sein de l'église anglicane. A partir de 2005, "John Crossman" sera son nouveau nom de baptême.

9- L’abjuration est à prendre au diapason du sens engagé dans la guerre des mots : ici ceux qui emploient l’expression « Mur occidental » sont dans le camp opposé de ceux qui disent « Mur des lamentations », « Mabqa » ou « Alboraq ».

10- Tout au long de l’assignation à résidence dont il fut l’objet depuis sa libération en 2004 et jusqu’à sa récente réincarcération, Mordechai Vanunu n’a cessé de demander à ce qu’on le déplace de Jérusalem-Ouest à Jérusalem-Est, et plus précisément dans la partie où la population arabe est enclavée. Chez Mordechai Vanunu, cette volonté de transfert est motivée non seulement par des raisons politiques évidentes mais aussi par l’instinct de survie, l’hostilité d’un environnement où les puritains de tout bord ne sont pas près de desserrer l’étau de la calomnie et de la persécution. Et l'on comprend davantage les risques liés à un tel environnement quand on se rappelle les conditions qui ont conduit à l'assassinat de Rabin en 1995.

source de l'image: desertpeace.wordpress.com

mardi 13 juillet 2010

Chat noir et chat blanc


Une amie sur Facebook m'a posé la question:

"Croyez-vous qu'il vaille mieux abolir les religions afin que celles-ci ne puissent plus servir de prétexte pour "placer les pions" des décideurs?"



Il est plus facile de désintégrer un atome qu'un préjugé (Einstein). Alors que dire quand on voudrait abolir les religions?
Et de toute façon, dès qu'une idéologie tente d'abolir la religion elle s'érige vite d'elle-même en nouvelle religion, ou avatar de cette religion: les idéologies qui momifient le suaire de Jésus ou le cadavre de Lénine dans son sarcophage c'est grosso modo du kif-kif au même.
La croisade des croyants contre les impies et son équivalent à travers les grandes révolutions qui ont marqué les siècles récents ont fait à peu près le même nombre de martyrs. Et les dégâts causés par les dogmes des uns et des autres, le mal de tous les systèmes à pensée unique est quasiment le même.

A mon avis, et pour ne pas verser à mon tour dans ce système réducteur et injuste de la pensée momifiée, la religion en soi n'est pas le mal absolu ni même le mal tout court. Si mal il y a il faut plutôt le chercher dans la tendance de certains religieux à pervertir le message de base, les préceptes fondamentaux, communs à toutes les religions.

Nous dresser contre l'obscurantisme, la tyrannie de tout système à pensée sclérosée et sclérosante, stigmatiser le fanatisme d'où qu'il vienne et nous persuader en toute circonstance que sans tolérance ni générosité partagées il n'y a pas d'avenir pour l'humanité me sembleraient suffire pour ôter et aux "pions" et aux "décideurs" ce pouvoir négatif sur les hommes.

lundi 12 juillet 2010

Il y a quatre ans, mourait à Nantes Taoufik Amri

Ce lundi 22 novembre 2010, c'est le 4e anniversaire de la mort de Taoufik Amri. Tunisien de 33 ans, marié et père d'une fillette d'à peine trois mois, mort en France dans des conditions pour le moins embrouillées.

Dans la nuit du 22 au 23 novembre 2006, ce jeune ouvrier est interpellé par une patrouille de police, à Nantes, alors qu’il sort d’un bar. Cela se passe au centre-ville, en présence de témoins. Taoufik est accompagné de deux compatriotes qui sont à la fois ses amis et ses collègues. Tous trois travaillent dans le bâtiment et résident sur le chantier à Cholet (Maine-et-Loire). En raison des intempéries, il leur est impossible de travailler, ce jour-là. Taoufik aurait bien voulu en profiter pour rentrer à Alençon (Basse-Normandie) où il a laissé sa femme et son bébé. Ses amis, célibataires, l'invitent à faire plutôt une virée en leur compagnie à Nantes. Et comme il n'est pas du genre à contrarier des amis, d'autant que la virée mène toujours à un bistrot, c'est finalement la virée qui a pris le dessus.

Les trois amis passent la journée et une bonne part de la soirée à boire. Vers 22h et quelque, ils quittent le bar. Taoufik tient son veston sur un bras et se dirige vers un tabac. C'est à ce moment-là qu'une voiture de la police s'arrête à sa hauteur.
La patrouille est à la recherche d’un individu qui aurait volé à l’arraché un sac et, voyant que Taoufik titube, ivre, deux policiers descendent, l'embarquent et la voiture disparaît. Ses amis ne réagissent pas, croyant à un contrôle d’identité routinier. Taoufik n'a pas été menotté et les agents n'ont fait usage d'aucune brutalité. Pourquoi un contrôle à bord du fourgon et pas sur place? La police dira:"en raison d'une certaine tension dans la rue".

Taoufik Amri ne reviendra pas pour raccompagner ses compagnons de route et de soirée, ni ne répondra au téléphone, ni ne donnera le moindre signe de vie.
Et la police nantaise, pendant des jours et des jours, contactée aussi bien par les amis de Taoufik que par la femme de celui-ci, Française, a nié avoir interpellé l’intéressé. Sous la pression médiatique, la police a dû revenir sur ses déclarations par la suite pour reconnaître que l’interpellation a bel et bien eu lieu, mais en précisant que Taoufik a été relâché peu de temps après, à quelques mètres seulement du lieu où il fut embarqué. La police ajoute à ces déclarations que Taoufik El-Amri a été embarqué parce qu’il n’avait pas de papiers sur lui (ce qui était faux) et qu’il n’était pas ivre (ce qui était encore faux). Par ailleurs, entre police et témoins les horaires de l’interpellation ne concordent pas : minuit selon la police, entre 22h et 22h30 selon les compagnons de Taoufik. Un troisième témoin, commerçant nantais du centre-ville, aurait confirmé l’horaire soutenu par les compagnons de Taoufik. Quoiqu’il en soit, cette interpellation n’a été enregistrée sur aucune main courante. Quant à savoir pourquoi, seule la police nantaise serait en mesure d’en fournir l’explication (1).

21 jours après cette interpellation, on retrouve le portefeuille du disparu avec sa carte d’identité et sa carte bancaire, quelque part à proximité du canal Saint-Félix, à Nantes (2) . Et quelques heures plus tard, ce que tout le monde appréhendait déjà s’était confirmé : on retrouve le corps de Taoufik noyé dans ce même canal, repêché sous une péniche. Alors que l’AFP rapporte qu’il n’y avait pas de trace de violence apparente sur le corps du défunt, le ministère public, par la voix de Stéphane Autin fait état d’ecchymoses sur les bras. Cette même source révèle en plus l’absence d’eau dans les poumons(3) , ce qui, aux yeux des avertis, exclut l’hypothèse de la mort par noyade.
L’autopsie conclut à une mort par hydrocution, liée à une imprégnation alcoolique : un taux d’alcoolémie de 3.7 grammes au moment de sa mort. Mais à ce jour, aucune information médico-légale additionnelle ne permet de confirmer "la mort par hydrocution". Et trois policiers ont été suspendus de leur fonction pour « faux témoignage » et « délaissement » mais ces policiers ont été laissés en liberté sous contrôle judiciaire.
Le 7 février 2007, dans le cadre de l’enquête sur cette mort on apprend qu’un SDF a été mis en examen pour coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort -sans intention de la donner- de Taoufik.
Bouc émissaire ou à bon droit suspect, le SDF avait été pris en charge dans la nuit du 22 au 23 novembre, trempé et tremblant de froid, par les pompiers. Le SDF avait chuté quelque part dans un cours d’eau, mais de là à avoir rencontré Taoufik Amri ou s’être disputé avec lui, il le niera tout au long de l’enquête. En fait, le seul élément plus ou moins pondérant dans cette mise en examen semble découler des contradictions du SDF sur le lieu de sa chute : la Loire d’abord, puis l’Erdre, avant de reconnaître être tombé dans le canal Saint-Félix. Forcément, la thèse d’une altercation avec le disparu deviendrait dans ces conditions plausible.
Quant au fait que cette accusation contredise le rapport des légistes qui n’avaient alors « pas relevé de traces de violence, de blessures, de perforations ou de plaies » sur le corps du défunt, cela ne semble pas avoir été pris en considération par la police nantaise.

Toujours est-il que, le 9 avril 2008, le parquet de Nantes a mis hors de cause le SDF cité et réclamé par contre le renvoi devant la correctionnelle des 3 policiers incriminés pour faux témoignage et délaissement.

Et enfin, en date du 26 février 2009 le tribunal de Nantes a condamné ces 3 policiers pour les délits précités à 4 mois d’emprisonnement avec sursis.
La partie civile comme les accusés ont fait appel.

Un an et neuf mois après, le jugement en appel est de nouveau renvoyé aux calendes..nantaises! Prévu pour le mardi 14 septembre dernier, le procès a été reporté en raison de l'absence de l'un des avocats des policiers prévenus.


A.Amri
21.11.10

Notes:
(1) Les déclarations invraisemblables des trois représentants des forces de l'ordre, leurs faux témoignages constituent une preuve, et non des moindres, de l’implication de ces agents dans la mort de Taoufik.
(2) Ces papiers ont été remis à la police de Nantes par M. Guy Samson qui aurait déclaré les avoir trouvés à proximité de sa péniche le 23 novembre 2006. Il y a lieu de se demander ici pourquoi ce monsieur a conservé tels papiers durant 18 jours alors que la disparition de Taoufik était amplement médiatisée (sur la presse locale et nationale comme sur les chaînes de TV)
(3) Conférence de presse de M. Stéphane Autin du 14/12/2006.


- Les délits incriminés dans le code pénal français
* Le faux témoignage

Art. 434-13: "Le témoignage mensonger fait sous serment devant toute juridiction ou devant un officier de police judiciaire agissant en exécution d'une commission rogatoire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende.

Toutefois, le faux témoin est exempt de peine s'il a rétracté spontanément son témoignage avant la décision mettant fin à la procédure rendue par la juridiction d'instruction ou par la juridiction de jugement".

Art.434-14: "Le témoignage mensonger est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100000 euros d'amende :

1° Lorsqu'il est provoqué par la remise d'un don ou d'une récompense quelconque ;

2° Lorsque celui contre lequel ou en faveur duquel le témoignage mensonger a été commis est passible d'une peine criminelle"

Extrait du Code pénal français – Section 2
Article 223-3

Le délaissement, en un lieu quelconque, d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende.
Article 223-4

Le délaissement qui a entraîné une mutilation ou une infirmité permanente est puni de quinze ans de réclusion criminelle.

Le délaissement qui a provoqué la mort est puni de vingt ans de réclusion criminelle.








Mis à jour il y a environ 10 mois · ·

إرفعوا أيديكم عن ظاهر المسعدي

منذ ساعات قليلة فقط وتحت ستار الليل تعرض بيت الأخ والرفيق ظاهر المسعدي و عائلته إلى الرمي بالحجارة على مدى 3 ساعات من طرف عصابة كانت تردد تهديدا مروعا ذا بعد سياسي واضح :" سنذبحكم يا خائني الوطن " ولم تقف هذه العصابة عند هذا الحد بل ذهبت أبعد من ذلك حيث عمدت إلى فتح باب البيت عنوة بقصد الدخول وترويع المعني و عائلته وربما اقتراف الجريمة التي تهدد بها. ولم يكن لعائلة المسعدي من خيار آخر سوى التسلل من البيت واللجوء لأحد الجيران للإحتماء به في حين اضطر ظاهر للقفز من أعلى السور حتى يتمكن من طلب الإستغاثة. وعند وصوله إلى مركز الشرطة ما ر اعه إلا أن يرفض العون المكلف بالدوام في هذه الليلة فتح الباب له معللا هذا الرفض بأن المركز يغلق أبوابه بعد السادسة ليلا
أي معنى لامتناع هذا العون عن أداء الواجب المناط بعهدته؟ هل هذا العون مكلف بحماية المواطنين أم دوره يقتصر على حراسة المركز؟ وماحاجة التونسيين إلى هذا المركز المحروس حين ينتهك اللأمن و الأعراض وتقترف الجرائم على مرأى ومسمع ممن عهدت إليهم مهمة حماية المواطنين؟
وما معنى أن يردد على مسامعنا ليلا نهارا أن تونس هي بلد الأمان والمؤسسات والقانون وحين نلجأ للقانون والمؤسسات والعيون الساهرة على بلد الأمان نحظى بجواب كهذا الذي تلقاه ظاهر المسعدي من العون المشار إليه سابقا؟
وأخيرا وليس آخرا : يا من صادرتم حقنا في الرأي و تنادون جهرا بسفك دمائنا على مذابح الوطنية الخالصة ارفعوا أيديكم عن "خائني
الوطن " فكلنا ظاهر المسعدي

Au pays de la sécurité, des institutions et des lois


Dans la nuit du 29 au 30 mai courant, Dhaher El- Meessadi et sa famille ont été réveillés par un tapage injurieux ( bruits et coups) qui a semé la terreur dans la paisible maison.
Jets de pierres sur la porte, les murs et les fenêtres, injures tonitruantes et, qui pis est! menaces de mort: tout cela s'est passé à Métouia, petite ville de la banlieue nord de Gabès, en Tunisie, le pays de la sécurité, des institutions et des lois.

Cet abominable tapage nocturne a duré trois heures aux dires de Dhafer. Trois
heures au cours desquelles le cri:" Nous vous égorgerons, traîtres de la Patrie" a été répété sans arrêt. Et comme si la menace de mort ne suffisait pas, comme si la terreur de cette famille avait besoin d'être amplifiée davantage les auteurs de cet acte criminel sont allés plus loin. Ils ont défoncé la porte de la maison, ce qui a forcé la famille à échapper in extremis par-derrière pour chercher refuge chez des voisins. Dhafer, quant à lui, a dû sauter par dessus la clôture de la maison pour aller prévenir la police, les appels téléphoniques entre-temps lancés étant restés sans réponse.
Arrivé au poste de police, Dhafer a beau frapper à la porte, beau crier qu'il avait instamment besoin d'assistance, il ne reçoit en guise de "secours" que la notification verbale de l'agent assurant cette nuit-là la permanence: "le poste est fermé à partir de 18 h".
Au pays de la sécurité, des institutions et des lois, voila un exemple, et non des moindre, du devoir scrupuleusement accompli par ceux qui veillent sur notre sécurité nationale.
Est-il besoin de rappeler que la non-assistance à une personne en danger, dans tous les pays et sans exception pour le nôtre, est un délit sanctionné par le code pénal.
Nous ne nous permettrons pas d'anticiper sur les suites que les autorités tunisiennes donneraient à cette affaire, mais il y a fort à parier que cet agent, irresponsable ou complaisant, au mépris de la loi et des institutions officielles ne sera pas poursuivi.

Pourquoi?
Parce que Dhafer El-Messadi est militant actif de l'U.G.T.T (Union Générale des Travailleurs Tunisiens) et du P.D.P. (Parti Démocratique Progressiste). Parce que les opposants, leurs familles, amis sympathisants et compagnie sont des "traîtres". Parce que la sécurité nationale n'est assurée qu'aux "citoyens honnêtes et rangés". Parce que les auteurs de ce tapage nocturne sont justement des citoyens honnêtes et rangés
.

A. Amri
12.07.10


Prélude mal joué

Encore une fois, la Marseillaise a été sifflée. Cette fois-ci chez nous, au stade de Radès, ce dimanche 30 mai 2010.
Alors qu'une rencontre sportive internationale et surtout amicale est censée rapprocher les peuples ou les nations représentés par les équipes qui y sont engagées, alors qu'on voulait une ambiance de fête et d'amitié aussi bien sur le terrain que sur les gradins, dans ce stade surnommé "Joyau de la Méditerranée" et dans un registre plutôt discordant le prélude de ce dernier Tunisie-France a été encore une fois mal joué. Entaché de fausses notes qui jurent autant avec le glatissement des Aigles (ou Aigles de Carthage* si vous voulez glatir plus haut!) qu'avec la voix habituellement chaude et accueillante du peuple tunisien dans son ensemble. Et de sa jeunesse en particulier.
Comme son précédent sur le sol français, ce prélude a été marqué de sifflets. Même si les moyens techniques ont permis d'étoffer ces sifflets, que le jeu des deux équipes et l'irréprochable esprit sportif dont elles ont fait preuve nous ont fait momentanément oublier le triste incident, il n'en reste pas moins que les Tunisiens ne voudraient ni ne pourraient se reconnaître dans un tel comportement.
Que ces jeunes aient un message à transmettre aux politiques français, on voudrait bien le comprendre si le contexte s'y prêtait. Mais siffler la Marseillaise ou tout autre hymne national, et dans ce contexte précis, c'est profaner d'abord l'hymne de son propre pays. C'est aussi offenser tant et tant d'hommes et de femmes qui n'ont rien à voir avec notre "message d'abrutis", dont certains, voire beaucoup aiment et défendent la Tunisie et qui, comme nous, refuseraient à bon droit cette injure injustifiée.Sans oublier que ce présumé message, quelle qu'en soit la nature, au vu même des lois physiques qui le régissent n'a aucune chance de passer. Si ce n'est sérieusement parasité.
Tunisiens et fiers de l'être, oui. Nous ne sommes pas indifférents aux problèmes de notre communauté en France, oui. Nous avons ceci ou cela à reprocher aux dirigeants français, oui. Mais le chauvinisme, le fanatisme, la xénophobie, entre autres formes d'intolérance qui sévissent un peu partout sur ce monde , ne doivent pas avoir droit de cité dans notre pays.




* Périphrase qui désigne l'équipe tunisienne de football.

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