Présentation:
Le lecteur qui ne connaît pas Riadh Chraïti est convié à consulter cette page sur ce même blog.
allégresse ...
les lèvres sourient et le cœur est égrotant
la rue : folle cohue de caravanes d'égarés
je dresse les tentes de mes déserts fuyant un instant de sucre
sur les articulations d'un air du vent
vent qui s'en prend aux écuelles des crève-cœur
et trace à tous venants sur leurs tablettes
des cartes en fibres de palme
qui tordent leurs sarments sur les rimes de l'absinthe
Rimes de l'absinthe? Expliquons:
une terre aux confins brûlés
pays aux montants qui s'éboulent
un peuple qui ne crève pas
il connaît parfaitement tous les noms d'incendies
depuis la Rome antique
à la Syrie de nos jours
il connait parfaitement l'oiseau phénix
son premier aïeul et son dernier
que de fois il s'est fardé de ses cendres
que de fois il a siroté son nectar
dont la flamme est connctée au nectar de Medjerda[1]
et de Bayyach[2] l'intraitable...
la rue : anarchie intime aux yeux errants
je vide cul sec le dernier verre
dans mon estomac à la langue châtiée
repu de l'immensité de la faim
une faim qui s'amuse à cueillir les idées du bled
tout en peignant sur la joue du ciel
une aquarelle aux couleurs de la guerre
une décennie maigre qui en pousse une autre pas moins étique
tandis que Monsieur : c'est de la fumée
voici des tas de courbatures et leurs reliefs
qui au milieu de la traversée se frayent leur chemin
vers la mémoire du feu
tas de peines qui serinent au restant des braises
les actes de triomphe
Triomphe ? Expliquons:
deux doigts ne suffiraient pas à le prononcer
les arcs aux entrées des cités le boudinent
nait un enfant
les bercails du pays fondent en larmes d'endeuillés
lesquelles larmes ne sont ni de lumière ni de résine aromatique
ce sont une sage dérivation du sol de Tunisie
la Tunisie dont les tresses sont pendues aux préaux de l'amour et des martyrs
que de fois j'ai seriné à mon enfant l'hymne du pays, et il en a pleuré
que de fois je l'ai emmailloté dans le drapeau du pays, et il a chanté:
si le peuple veut un jour la vie
force est pour le destin de répondre
Traduit par A. Amri
10. 04. 2022
[1] Medjerda est le plus long cours d'eau et le seul pérenne de Tunisie, dont la source est située à Souk-Ahras en Algérie et le lit est principalement sur le territoire tunisien.
[2] Bayyach est le plus important oued de Gafsa.
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