Mesdames et messieurs,
Permettez-moi de vous dire que je suis scandalisé, outré, écœuré (et c'est trop peu dire) de votre silence coupable au sujet de Yosri Trigui.
Permettez-moi de vous dire qu'en termes de vérité, de conscience professionnelle, d'éthique journalistique et de responsabilité, vous êtes loin, bien loin du minimum requis pour postuler à la qualité et au statut de médias. Dignes de respect et de crédibilité s'entend.
Permettez-moi de vous dire que Yosri Trigui, condamné à mort en Irak pour des crimes qu'il a toujours récusés, n'a bénéficié d'aucun clin d’œil dans vos journaux ou flashs d'infos. D'aucun créneau, si minime soit-il, dans vos débats nationaux passionnants et vos non moins passionnantes péroraisons révolutionnaires, susceptible de le tirer des oubliettes où il a été jeté. D'aucune miette d'intérêt ou de charité de votre part, pouvant témoigner de votre existence. Aucune faveur ne lui a été accordée, pas même l'ébauche d'un reportage, ni le moindre écho aux incessants appels de détresse en sa faveur, lancés ça et là sur internet. A en croire que vous vivez barricadés sur une autre planète ou que Yosri, banni de la vôtre, n'est plus pour vous de ce monde.
Comme si, Mesdames, Messieurs, vous voulez être complices, et vous l'êtes!(1) de la justice inique et absurde qui réclame indument depuis 2006 la tête de ce jeune tunisien.
Comme si, Mesdames, Messieurs, la révolution tunisienne ne vous concerne pas, l'information que vous faites refusant d'emboîter le pas aux forces et consciences vives du pays, sourde aux cris des femmes et hommes réclamant leur dû aux laissés-pour-compte d'hier et des temps actuels. En l’occurrence plus de justice. Ou plus exactement, moins d'injustice surtout!
Mesdames et messieurs,
Permettez-moi de vous dire, vous qui avez évoqué récemment à la sauvette, presque dans la honte, la demande de grâce faite par notre ministre de la justice à son homologue irakien, que Yosri Trigui n'est pas coupable!
N'en déplaise à ceux qui sont aveugles et sourds pour ne pas voir ni dire la vérité. N'en déplaise à ceux qui ne savent de Yosri Trigui que le surnom Abou Kodama le Tunisien, en l’occurrence soumis à la jauge bien-pensante leur paraissant à lui seul suspect, pour ne pas dire accablant! Abou Kodama, dans le dico des rimes et la mécanique des réflexes mentaux, appelant automatiquement Ossama!
Vous avez peur de citer "la lèpre"! Vous avez tort. La pensée unique, le parti pris, les préjugés qu'on vous avait fait ingurgiter ou colporter sous Ben Ali vous enferment dans une prison sinistre pire que celle où croupit le condamné à mort. Puisqu'ils vous empêchent de respirer un air moins fétide que celui des années de braise, et de voir la vérité sous un angle autre que celui qui la déforme.
Yosri Trigui, Mesdames, Messieurs, n'est pas un terroriste. N'est pas un extrémiste islamiste. Ni un criminel comme d'aucuns se plaisent à le présenter. Se complaisent à le décrire.
Ôtez vos mains de l'info et lisez Jürgen Todenhôfer(2). Demandez au petit frangin de Yosri Trigui ce qui a conduit son frère en Irak, et il vous dira:" il est parti pour venger le sang de Mohamed Dorra." Oui, ce candide jeune homme était parti en Irak pour ça! A un moment où les adultes que nous sommes, hommes, femmes, peuples par millions, n'avons rien entrepris qui puisse juguler le désespoir de Yosri et tant d'autres de son âge. Nous nous sommes contentés, impuissants, de regarder l'image et d'avaler la couleuvre. S'il y a un coupable qui soit justiciable dans cette affaire, c'est nous, et en aucun cas Yosri.
Dans un monde juste, un monde où l'information assumerait comme il se doit la responsabilité qui lui incombe, Yosri Trigui demanderait à être purement et simplement réhabilité, et non à être gracié. Ni plus ni moins.
Mesdames et messieurs,
Yosri Trigui a été condamné une première fois à la peine de mort en 2006 sur la base d'aveux extorqués sous la torture. Torture à laquelle il a été soumis aux rares moments de rémission qu'il a eus dans son coma, blessé de sept balles et ne devant sa survie qu'à un miracle(3). Les deux crimes majeurs ayant fait le poids dans la sentence de mort, Yosri Trigui les a constamment déniés . Et de nouveaux éléments survenant après ce premier procès ont appuyé ce juste déni et prouvé l'innocence du condamné:
- Le 4 août 2009, on a arrêté le nommé Yasser Ali, appartenant aux commandos de la police irakienne, qui a reconnu sa culpabilité exclusive dans le rapt et le meurtre de Atouar Bahjat.
- Début janvier 2008, on a arrêté Mahmoud Dahaoui qui a reconnu à son tour être l'auteur du dynamitage du mausolée chiite de Samarra.
Tant que Yosri Trigui fut à la charge administrative des Américains (2006-2009), ces derniers n'ont pas osé signer sa mise à mort. D'ailleurs, en 2008, dans le procès en appel un sursaut de conscience a dû jouer en faveur de Yosri, chez les juges, justifiant le rejet de toutes les accusations dont il fut affublé. On n'a retenu contre lui que le délit de son entrée clandestine en Irak: délit mineur mais qui lui a valu 15 ans de prison quand même, compte tenu de la loi anti-terroriste entrée en vigueur au lendemain des attentats du 11 septembre, primant chez les juges sur toute autre loi.
Mesdames et messieurs,
Quand vous reprenez à la lettre ce qu'on vous dit au sujet de Yosri Trigui, forcément vous ne pouvez que faillir au journalisme et à l'éthique de ce métier.
Mais dites-vous que la vérité est tout autre. Contre toute attente, le jugement en cassation qui a eu lieu au moment même où la Tunisie vit au pouls de la révolution, début février 2011, a reconduit le premier verdict prononcé en 2006, au mépris de toutes les preuves d'innocence blanchissant Yosri Trigui des deux principales charges initialement retenues contre lui. En plus, ce dernier procès s'est déroulé en l'absence de l'accusé et de son avocat. Yosri Trigui n'a appris sa condamnation à la peine capitale que des semaines après la fin du procès, par une lettre émanant du ministère irakien de la justice, qui lui a été envoyée par poste à sa prison.
Par conséquent, quand notre ministre de la justice, répondant bien plus à la pression d'une partie de l'opinion publique intérieure qu'à son devoir (en tant que chef d'instance représentant la partie civile tunisienne) plaide auprès de son homologue irakien la cause de Yosri Trigui, il devrait réclamer avant tout la révision du procès. Et le réclamer de vive voix. Compte tenu de sa non implication dans des actes terroristes, Yosri Trigui n'a pas besoin de demande de grâce.Sauf si celle-ci s'avère inévitable comme procédure d'urgence visant l'arrêt de l'exécution. Mais il a besoin surtout d'une demande de réhabilitation.
Il a besoin aussi d'un sursaut de conscience nationale, une mobilisation massive qui engage à la fois les citoyens, les médias, les associations non gouvernementales et les partis politiques. D'où la nécessité, le devoir impérieux qui vous interpelle, Mesdames et messieurs les responsables de télés nationales. S'il y a un complot de silence à ce sujet, refusez de vous subordonner à ceux qui sont derrière. Soutenez dans cette rude épreuve ce jeune homme qui clame son innocence depuis sa prison à Bagdad. Et mettez sur le gouvernement la pression requise afin de l'inciter à se battre sans concessions pour sauver et faire rapatrier Yosri.
A.AmriPermettez-moi de vous dire que je suis scandalisé, outré, écœuré (et c'est trop peu dire) de votre silence coupable au sujet de Yosri Trigui.
Permettez-moi de vous dire qu'en termes de vérité, de conscience professionnelle, d'éthique journalistique et de responsabilité, vous êtes loin, bien loin du minimum requis pour postuler à la qualité et au statut de médias. Dignes de respect et de crédibilité s'entend.
Permettez-moi de vous dire que Yosri Trigui, condamné à mort en Irak pour des crimes qu'il a toujours récusés, n'a bénéficié d'aucun clin d’œil dans vos journaux ou flashs d'infos. D'aucun créneau, si minime soit-il, dans vos débats nationaux passionnants et vos non moins passionnantes péroraisons révolutionnaires, susceptible de le tirer des oubliettes où il a été jeté. D'aucune miette d'intérêt ou de charité de votre part, pouvant témoigner de votre existence. Aucune faveur ne lui a été accordée, pas même l'ébauche d'un reportage, ni le moindre écho aux incessants appels de détresse en sa faveur, lancés ça et là sur internet. A en croire que vous vivez barricadés sur une autre planète ou que Yosri, banni de la vôtre, n'est plus pour vous de ce monde.
Comme si, Mesdames, Messieurs, vous voulez être complices, et vous l'êtes!(1) de la justice inique et absurde qui réclame indument depuis 2006 la tête de ce jeune tunisien.
Comme si, Mesdames, Messieurs, la révolution tunisienne ne vous concerne pas, l'information que vous faites refusant d'emboîter le pas aux forces et consciences vives du pays, sourde aux cris des femmes et hommes réclamant leur dû aux laissés-pour-compte d'hier et des temps actuels. En l’occurrence plus de justice. Ou plus exactement, moins d'injustice surtout!
Mesdames et messieurs,
Permettez-moi de vous dire, vous qui avez évoqué récemment à la sauvette, presque dans la honte, la demande de grâce faite par notre ministre de la justice à son homologue irakien, que Yosri Trigui n'est pas coupable!
N'en déplaise à ceux qui sont aveugles et sourds pour ne pas voir ni dire la vérité. N'en déplaise à ceux qui ne savent de Yosri Trigui que le surnom Abou Kodama le Tunisien, en l’occurrence soumis à la jauge bien-pensante leur paraissant à lui seul suspect, pour ne pas dire accablant! Abou Kodama, dans le dico des rimes et la mécanique des réflexes mentaux, appelant automatiquement Ossama!
Vous avez peur de citer "la lèpre"! Vous avez tort. La pensée unique, le parti pris, les préjugés qu'on vous avait fait ingurgiter ou colporter sous Ben Ali vous enferment dans une prison sinistre pire que celle où croupit le condamné à mort. Puisqu'ils vous empêchent de respirer un air moins fétide que celui des années de braise, et de voir la vérité sous un angle autre que celui qui la déforme.
Yosri Trigui, Mesdames, Messieurs, n'est pas un terroriste. N'est pas un extrémiste islamiste. Ni un criminel comme d'aucuns se plaisent à le présenter. Se complaisent à le décrire.
Ôtez vos mains de l'info et lisez Jürgen Todenhôfer(2). Demandez au petit frangin de Yosri Trigui ce qui a conduit son frère en Irak, et il vous dira:" il est parti pour venger le sang de Mohamed Dorra." Oui, ce candide jeune homme était parti en Irak pour ça! A un moment où les adultes que nous sommes, hommes, femmes, peuples par millions, n'avons rien entrepris qui puisse juguler le désespoir de Yosri et tant d'autres de son âge. Nous nous sommes contentés, impuissants, de regarder l'image et d'avaler la couleuvre. S'il y a un coupable qui soit justiciable dans cette affaire, c'est nous, et en aucun cas Yosri.
Dans un monde juste, un monde où l'information assumerait comme il se doit la responsabilité qui lui incombe, Yosri Trigui demanderait à être purement et simplement réhabilité, et non à être gracié. Ni plus ni moins.
Mesdames et messieurs,
Yosri Trigui a été condamné une première fois à la peine de mort en 2006 sur la base d'aveux extorqués sous la torture. Torture à laquelle il a été soumis aux rares moments de rémission qu'il a eus dans son coma, blessé de sept balles et ne devant sa survie qu'à un miracle(3). Les deux crimes majeurs ayant fait le poids dans la sentence de mort, Yosri Trigui les a constamment déniés . Et de nouveaux éléments survenant après ce premier procès ont appuyé ce juste déni et prouvé l'innocence du condamné:
- Le 4 août 2009, on a arrêté le nommé Yasser Ali, appartenant aux commandos de la police irakienne, qui a reconnu sa culpabilité exclusive dans le rapt et le meurtre de Atouar Bahjat.
- Début janvier 2008, on a arrêté Mahmoud Dahaoui qui a reconnu à son tour être l'auteur du dynamitage du mausolée chiite de Samarra.
Tant que Yosri Trigui fut à la charge administrative des Américains (2006-2009), ces derniers n'ont pas osé signer sa mise à mort. D'ailleurs, en 2008, dans le procès en appel un sursaut de conscience a dû jouer en faveur de Yosri, chez les juges, justifiant le rejet de toutes les accusations dont il fut affublé. On n'a retenu contre lui que le délit de son entrée clandestine en Irak: délit mineur mais qui lui a valu 15 ans de prison quand même, compte tenu de la loi anti-terroriste entrée en vigueur au lendemain des attentats du 11 septembre, primant chez les juges sur toute autre loi.
Mesdames et messieurs,
Quand vous reprenez à la lettre ce qu'on vous dit au sujet de Yosri Trigui, forcément vous ne pouvez que faillir au journalisme et à l'éthique de ce métier.
Mais dites-vous que la vérité est tout autre. Contre toute attente, le jugement en cassation qui a eu lieu au moment même où la Tunisie vit au pouls de la révolution, début février 2011, a reconduit le premier verdict prononcé en 2006, au mépris de toutes les preuves d'innocence blanchissant Yosri Trigui des deux principales charges initialement retenues contre lui. En plus, ce dernier procès s'est déroulé en l'absence de l'accusé et de son avocat. Yosri Trigui n'a appris sa condamnation à la peine capitale que des semaines après la fin du procès, par une lettre émanant du ministère irakien de la justice, qui lui a été envoyée par poste à sa prison.
Par conséquent, quand notre ministre de la justice, répondant bien plus à la pression d'une partie de l'opinion publique intérieure qu'à son devoir (en tant que chef d'instance représentant la partie civile tunisienne) plaide auprès de son homologue irakien la cause de Yosri Trigui, il devrait réclamer avant tout la révision du procès. Et le réclamer de vive voix. Compte tenu de sa non implication dans des actes terroristes, Yosri Trigui n'a pas besoin de demande de grâce.Sauf si celle-ci s'avère inévitable comme procédure d'urgence visant l'arrêt de l'exécution. Mais il a besoin surtout d'une demande de réhabilitation.
Il a besoin aussi d'un sursaut de conscience nationale, une mobilisation massive qui engage à la fois les citoyens, les médias, les associations non gouvernementales et les partis politiques. D'où la nécessité, le devoir impérieux qui vous interpelle, Mesdames et messieurs les responsables de télés nationales. S'il y a un complot de silence à ce sujet, refusez de vous subordonner à ceux qui sont derrière. Soutenez dans cette rude épreuve ce jeune homme qui clame son innocence depuis sa prison à Bagdad. Et mettez sur le gouvernement la pression requise afin de l'inciter à se battre sans concessions pour sauver et faire rapatrier Yosri.
30.07.2011
Notes:
1- Qui ne dit mot consent, assure le vieil adage. Et je voudrais citer encore Emonet Pierre SJ:
"Tout silence n’est pas d’or. Peu s’en faut. Il est même des silences coupables. Celui des chiens muets, du veilleur enfermé dans sa tour d’ivoire, qui se tait et ne dénonce pas, des pleutres qui n’ont rien entendu parce qu’ils ne veulent pas d’histoires. Courtisans serviles, carriéristes alignés, pharisiens légalistes, responsables timorés, pantins dans la cour des grands, à chacun son silence. Silence diplomatique des chancelleries, silence combinard des politiciens, silence dévot de Tartuffe, silence conformiste des médias, silences troublés par le cri des pauvres et des petits, les gémissements de la nature dévastée, la détresse des victimes des modes et de l’argent facile, la supplication de ceux et celles qui plient sous des jougs intolérables."
2- Auteur allemand d'un livre consacré à la résistance irakienne Zaiel: pourquoi tu tues?
(ce livre a été traduit en arabe sous le titre لماذا تقتل يازيد؟
3- Lettre à Yosri
___________ Au même sujet:
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/yosri-trigui-le-plaidoyer-du-pere.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/lettre-yosri.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/la-bienveillante-attention-de-m-beji.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/blog-post_23.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/la-bienveillante-attention-de-m-recep.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/violette-daguerre-et-haytham-manna.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/mme-micheline-calmy-rey.html
http://amriahmed.blogspot.com/2011/07/jose-luis-rodriguez-zapatero.html
2 commentaires:
votre adresse mail n'est pas valide !!!
Je vous fais savoir que j'ai relayé vos posts à avaaz http://www.avaaz.org/fr/.
Merci à vous de ce blog.
Merci de votre soutien et merci de m'avoir prévenu pour l'adresse mail: l'extension .com est effectivement invalide. C'est .fr plutôt et c'est rectifié.
Enregistrer un commentaire