Il a connu la gloire, les honneurs, les hautes fonctions, la récompense du
mérite. Puis le vent a tourné.
Durant 24 ans, pour avoir été l'indéfectible ami de Bourguiba, il a éprouvé ce que les ci-devant en
France avaient subi au lendemain de la Révolution de 1789. Il avait un
café à Tunis, on lui en a confisqué la patente. Ne pouvant le rouvrir,
il fut contraint de le vendre. A moitié prix1.
Il avait un manuscrit2 en
attente de permis de publication, on lui a refusé le permis. Et ses
écrits, sa poésie, son nom, autrefois incontournables dans les pages culturelles des quotidiens, et dans les revues littéraires, sont devenus du jour au
lendemain tabous, blasphèmes.
Il était
manifeste que le dictateur voulait sa mort. A défaut de le voir, délié
de ses vieilles attaches, repenti de son bourguibisme inconditionnel, en commerce avec lui. Car derrière cette
hargne, outre la fin de non recevoir opposée à Carthage qui, à travers
son ministre de la culture, téléphonait,
invitait, sollicitait les faveurs du poète3, un pamphlet, et marquant le début des années de braise4, contre Zin al-Arab5. Zin al-Arab qui voulait faire du Zarati6 le
chantre du 7 Novembre,
et «l’ingrat Zarati» crachait sur la main providentielle. Un autre à sa
place, au premier clin d’œil gracieux de Ben Ali, aurait fait exploser de youyous
sa gorge. Avant d'accourir baiser, avec la plus extrême
dévotion, la main et les bottes de la grâce. Lui, il a tout
simplement dit non. Sans même juger nécessaire de dire cela avec
courtoisie. Et comble du kufr,
il osait attaquer par une satire mordante Zin al-Arab! Carthage n'a rien ménagé
pour lui faire regretter un tel affront. Mais c'était méconnaître la
trempe du poète. Et
l'indéfectible lien qui l'attachait à Bourguiba et le faisait mépriser si fort Ben Ali. Bourguiba l'ami, le
frère ainé, le « ci-devant n°1» qui fut un monument, enfermé dans sa
villa-prison de Monastir, injurié par l'un de ses anciens laquais, et avec
la bénédiction de tant et tant de félons.
Le
poète n'était ni de la race prostituable ni des plumes achetables. A ce
propos, beaucoup de Tunisiens de la vieille génération se sont
longtemps mépris sur son compte. Et quoique lui reconnaissant la force
du vers classique, la verve étourdissante, l'esthétique irréprochable, ils lui en voulaient d'avoir
été le tribun immodéré du bourguibisme. Même son neveu Mokhtar, pourtant sorti de l'école "Houat Al-Adab"7, ne l'a pas ménagé là-dessus8. Toutefois Mokhtar savait, en poète engagé d'abord, en professeur d'arabe9 autant qu'en littérateur averti, que « l'âme damnée» de son « Étoile polaire »10 n'était pas un vulgaire thuriféraire du pouvoir. Il savait que son oncle était à Bourguiba, toutes proportions gardées, ce que furent H̩assan ibn T̠habit au Prophète, Al-Moutanabbi à Seif-addaoulat, Aimé Césaire à Senghor, Pablo Neruda à Allende. Entre autres. S'il avait chanté, en toute occasion, les luttes et les mérites du Combattant-Suprême, c'était non par arrivisme, non par khobzisme comme diraient les Tunisiens, mais il l'a fait en militant sincère et convaincu, en bourguibiste engagé. Et chaque vers, chaque syllabe, chaque lettre dédiée à son ami sortaient droit de son cœur. Un cœur sur une lèvre11, comme le dit si bien le titre de son premier recueil de poésie. Mokhtar, politiquement d'une tout autre couleur, savait cela. Et si la politique, l'idéologie, l'âge, les formes d'écriture, séparaient nettement leurs poésies respectives, le cadet n'a jamais désavoué le sang. L'oncle non plus, d'ailleurs, qui a pleuré son petit neveu parti à la fleur de l'âge, à travers un poème ayant pour titre «Atroce ! le crépuscule des croissants».
le croissant s'est évanoui
à peine émergé de la masse noire
pour annoncer la nouvelle lunaison
l'éphémère avait respiré
et ce fut un parfum étincelant
une lumière qui embaume
et un flambeau à l’horizon12
Son amitié avec le premier président de la Tunisie indépendante fut la conséquence d'un coup de cœur bourguibien pour l'un de ses poèmes, entendu à la radio13. Apparemment, il s'agirait de l'un des premiers poèmes dédiés à sa terre natale Zarat14. Grand mordu de poésie, Bourguiba a demandé aussitôt à voir l'auteur. Et dès la première rencontre, une amitié sans fin va unir les deux personnages, que les années-mêmes de l'infortune commune n'ont pu que fortifier. Dans sa villa-prison, le président déchu n'avait droit qu'à de rares visites. Même la correspondance avec ses proches et ses amis lui était interdite. Et le poète figurait en tête de la liste rouge. Bourguiba avait beau crier, beau écrire au procureur de Monastir, demandant à être sorti de sa geôle ou jugé, jugé pour donner quelque sens à l'absurde de sa condition, ses requêtes sont restées lettres mortes.
Le 6 avril 2000, la mort a daigné accorder au prisonnier de sa villa la délivrance. La télévision nationale qui a consacré à la nouvelle un flash d'à peine deux minutes a poursuivi ses émissions ordinaires comme si de rien n'était. Et les Tunisiens, médusés, n'imaginaient pas encore ce que leur réservait le lendemain, jour d'enterrement. Alors que de nombreux chefs d’États étrangers étaient venus pour rendre un dernier hommage à Bourguiba, que des millions de citoyens s'étaient rivés de bon matin à leurs télés pour suivre les funérailles, la télévision, elle, jugea plus sensé d'honorer le mort en rappelant aux vivants les acquis du 7 Novembre. Poussant jusqu'au bout son cynisme, Ben Ali avait donné l'ordre de ne pas transmettre les obsèques de Bourguiba.
Le poète, alors âgé de 88 ans, n'a pas pleuré depuis bien des années. Ce jour-là, à la faveur de cette dernière injure à Bourguiba il a retrouvé sa fraîcheur émotionnelle. Pleurant l'ami, le frère aîné, certes, mais bien plus de l'oppression qui ne pouvait plus se faire comprimer. Comment pouvait-on gratifier ainsi Si Lahbib15: celui qui a tout donné à la Tunisie, les plus belles années de sa jeunesse, 25 ans entre prisons internes et externes, déportations et exils16, celui qui a sillonné l'Orient et l'Occident pour plaider la cause de son pays, celui qui a fini par obtenir gain de cause et, devenu président, tablant sur l'enseignement comme atout majeur du développement, a fait de la Tunisie un pays moderne ? Comment priver dans son cercueil un tel homme de l'ultime honneur, certes, symbolique, mais inscrit comme devoir national dans les protocoles de tous les États ?Un tel coup lâche de Ben Ali, le poète en fut marqué pour la vie. Sans compter que les derniers vœux du défunt, l'oraison funèbre dont il a confié la charge depuis de longues années à son ami le poète, n'ont pas été exaucés.
Le 7 avril 2000, Ahmed Laghmani ne fut même pas autorisé à assister à l'enterrement de son ami. Ce qui ne l'a pas empêché de s'acquitter comme il se doit de la charge qui lui a été dévolue.
Seigneur tu fus, Seigneur tu resteras
le peuple a oublié ou feint l'oubli
à quoi bon les griefs ou les rappels
mais où sont les acclamations
en tout lieu retentissantes ?
où sont, tonitruants, les vivats ?
où sont "nous te sommes hosties
à toi notre sang et notre vie" ?
où sont les timbaliers et leurs timbales
les hautbois et leurs chalemies ?17
En janvier 2014, les Tunisiens ont chassé Ben Ali. Quoique marqué par la maladie d'Alzheimer, quand il a appris cela, Ahmed Laghmani a eu les yeux illuminés d'un vif éclat. Pour la jeunesse qui a réalisé l'exploit, il a ressenti un immense bonheur18. Quant aux torts subis à titre personnel et familial, cela faisait un bon bout de temps que, la maladie aidant, il n'y pensait plus.
Le 19 avril 2015, après un long combat contre la maladie, Ahmed Laghmani s'est éteint à l'âge de 92 ans. Dans la sérénité, au milieu de ses 5 enfants et sa femme, dans sa maison à Cité Annasr (Tunis). Il a été inhumé le lendemain dans sa terre natale, Zarat, à côté de son neveu Mokhtar Laghmani.
Le cimetière où les deux poètes reposent est à mi-chemin entre la belle plage de la ville et sa non moins belle oasis. Écoutons ce que dit de cette belle amante son achoug:
Oh, m'amie ! ma douce oasis ! quel picaro j'étais !
Je soupirais, étourdi, après des chimères
J'ai musé des années tissant mes illusions
Pour en faire une belle burda pas à ma taille
J'ai battu les chemins, scruté les horizons
Sollicitant un sein comme le tien qui m'abreuve
Mais nulle part, jamais, à l'étau de tes bras
Je n'ai trouvé d'égal et d'aussi chaud, jamais
Ni palmier qui émousse comme le tien la canicule
Ni eau de roche plus limpide que ta source
Ni d'autre bouclier contre l'adversité
Comme la fratrie nourrie à ton lait de palme19
Né à Zarat (autrefois village mais ville aujourd'hui) le 31 mars
1923, diplômé de l’École normale en 1946, après avoir été inspecteur d'enseignement primaire, il est nommé directeur de la radio tunisienne (RTT). Il a animé durant plusieurs années une émission destinée à soutenir les auteurs en herbe: Houat Al-Adab. Il a exercé plusieurs fonctions en parallèle: chargé de mission auprès de l'ALECSO, membre de l'Académie Bayt Al-Hikma
(Maison de Sagesse), membre d'honneur de l'Association culturelle Fès-Saïss
Ahmed Amri
18.04.2016
=== Notes ===
1- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011
2- Ibid. Le manuscrit a pour titre عواصف الخريف Tempêtes d'automne.
3- Ibid.
4- Écrit en 1991, le poème يا نازح الدار [Ô toi le transmigré] a bénéficié d'une large diffusion sur les campus universitaires surtout, la censure qui frappait le poète ne permettant pas sa publication par les médias écrits.
5- En arabe زين العرب , littéralement "Beauté des Arabes", surnom donné par Yasser Arafat à Zine el-Abidine Ben Ali.
6- Gentilé des habitants de Zarat dont Laghmani est natif.
7- هواة الأدب , littéralement "Amateurs de littérature" était une émission de radio hebdomadaire dédiée aux auteurs en herbe, que Ahmed Laghmani a co-animée tour à tour avec Mokhtar Hchicha, Adel Youssef et Abdelaziz Kacem.
8- Dans son poème Hafryaton fi jassedin arabi حفريات في جسد عربي (Fouilles dans un corps arabe), on devine à qui s'adresse au juste le jeune poète quand il écrit:
"كلماتك حمرا" قال
فما لـَوْنُ دمي؟
"Tes mots, dit-il, sont rouges !"
Mais quelle est la couleur de mon sang ?
9- De la vie qu'il a traversée vie en météorite, Mokhtar n'a pu donner à l’enseignent que deux mois, hélas.
10- Ya najmna attalîî يا نجمنا الطالع , littéralement Ô notre étoile ascendante, titre d'un poème dédié à Bourguiba, mis en musique par Chedhli Anouar et chanté par Naâma.
11- En arabe: قلب على شفة، تونس -الدار التونسية , 1966. STD, Tunis, 1966.
12- Le poème hommage a été publié dans Assabah du 20 janvier 1977.
فظيع أفول الأهلّة
توارى الهلال ولم يتبرّج سوى بعض ليله
على مطلع شفقيّ البساط
تنفست اللمحات المطلّة...
فكانت عبيرا مشعّ
وكانت ضياء يضوع
وكانت على الأفق شعلة
Source: http://almoktar1963.blogspot.com; page.
13- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011.
14- Le poème en question serait le classique (pour rappel, l'un des sens premiers de ce mot veut dire "s'enseigne en classe") figurant depuis les années 1960 dans nos manuels scolaires: Deux palmiers (جذعان). Il m'a été impossible de vérifier cette information que je tiens de l'un des neveux du poète. En tout cas, c'est soit cette merveille de facture qui a été traduite en 1999 par Jean Fontaine (Histoire de la littérature tunisienne [tome III, p.40/41], Cérès, 1999), soit sa sœur, de même veine: «زاراتُ» إني قد أتيتُكِ ذاكرًا عهد الصبا , Zarat, je suis venu à toi, évoquant ma prime jeunesse, datant elle aussi de la même époque.
15- Si, en arabe سي , est l'abréviation de sayed سيد (monsieur, seigneur) qui a donné "Cid" en espagnol et en français (Le Cid de Corneille), séide aussi, quoique le sens français ait été "corrompu" par Voltaire, ici titre d'un recueil dédié à Habib Bourguiba.
16- Bourguiba a été emprisonné au pénitencier de Téboursouk, puis au Fort Saint-Nicolas de Marseille, ensuite à la prison Montluc à Lyon, enfin au Fort de Vancia dans le département du Rhône. Il a été déporté également au Sud tunisien (3 ans à Bordj le Bœuf), puis à Tabarka, à La Galite et à l’île de Groix.
17- Extrait reconstitué à partir du texte oralisé dans l'émission de télé اليوم الثامن Al-Yawm atthamen [littéralement, Le 8e jour] sur Al-Hiwar Attounsi TV.
18- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011.
19- Le poème intégral dans ses versions arabe et traduite en fr., sur ce blog.
Ahmed Laghmani |
Mokhtar Laghmani |
le croissant s'est évanoui
à peine émergé de la masse noire
pour annoncer la nouvelle lunaison
l'éphémère avait respiré
et ce fut un parfum étincelant
une lumière qui embaume
et un flambeau à l’horizon12
Son amitié avec le premier président de la Tunisie indépendante fut la conséquence d'un coup de cœur bourguibien pour l'un de ses poèmes, entendu à la radio13. Apparemment, il s'agirait de l'un des premiers poèmes dédiés à sa terre natale Zarat14. Grand mordu de poésie, Bourguiba a demandé aussitôt à voir l'auteur. Et dès la première rencontre, une amitié sans fin va unir les deux personnages, que les années-mêmes de l'infortune commune n'ont pu que fortifier. Dans sa villa-prison, le président déchu n'avait droit qu'à de rares visites. Même la correspondance avec ses proches et ses amis lui était interdite. Et le poète figurait en tête de la liste rouge. Bourguiba avait beau crier, beau écrire au procureur de Monastir, demandant à être sorti de sa geôle ou jugé, jugé pour donner quelque sens à l'absurde de sa condition, ses requêtes sont restées lettres mortes.
Le 6 avril 2000, la mort a daigné accorder au prisonnier de sa villa la délivrance. La télévision nationale qui a consacré à la nouvelle un flash d'à peine deux minutes a poursuivi ses émissions ordinaires comme si de rien n'était. Et les Tunisiens, médusés, n'imaginaient pas encore ce que leur réservait le lendemain, jour d'enterrement. Alors que de nombreux chefs d’États étrangers étaient venus pour rendre un dernier hommage à Bourguiba, que des millions de citoyens s'étaient rivés de bon matin à leurs télés pour suivre les funérailles, la télévision, elle, jugea plus sensé d'honorer le mort en rappelant aux vivants les acquis du 7 Novembre. Poussant jusqu'au bout son cynisme, Ben Ali avait donné l'ordre de ne pas transmettre les obsèques de Bourguiba.
Le poète, alors âgé de 88 ans, n'a pas pleuré depuis bien des années. Ce jour-là, à la faveur de cette dernière injure à Bourguiba il a retrouvé sa fraîcheur émotionnelle. Pleurant l'ami, le frère aîné, certes, mais bien plus de l'oppression qui ne pouvait plus se faire comprimer. Comment pouvait-on gratifier ainsi Si Lahbib15: celui qui a tout donné à la Tunisie, les plus belles années de sa jeunesse, 25 ans entre prisons internes et externes, déportations et exils16, celui qui a sillonné l'Orient et l'Occident pour plaider la cause de son pays, celui qui a fini par obtenir gain de cause et, devenu président, tablant sur l'enseignement comme atout majeur du développement, a fait de la Tunisie un pays moderne ? Comment priver dans son cercueil un tel homme de l'ultime honneur, certes, symbolique, mais inscrit comme devoir national dans les protocoles de tous les États ?Un tel coup lâche de Ben Ali, le poète en fut marqué pour la vie. Sans compter que les derniers vœux du défunt, l'oraison funèbre dont il a confié la charge depuis de longues années à son ami le poète, n'ont pas été exaucés.
Le 7 avril 2000, Ahmed Laghmani ne fut même pas autorisé à assister à l'enterrement de son ami. Ce qui ne l'a pas empêché de s'acquitter comme il se doit de la charge qui lui a été dévolue.
Seigneur tu fus, Seigneur tu resteras
le peuple a oublié ou feint l'oubli
à quoi bon les griefs ou les rappels
mais où sont les acclamations
en tout lieu retentissantes ?
où sont, tonitruants, les vivats ?
où sont "nous te sommes hosties
à toi notre sang et notre vie" ?
où sont les timbaliers et leurs timbales
les hautbois et leurs chalemies ?17
En janvier 2014, les Tunisiens ont chassé Ben Ali. Quoique marqué par la maladie d'Alzheimer, quand il a appris cela, Ahmed Laghmani a eu les yeux illuminés d'un vif éclat. Pour la jeunesse qui a réalisé l'exploit, il a ressenti un immense bonheur18. Quant aux torts subis à titre personnel et familial, cela faisait un bon bout de temps que, la maladie aidant, il n'y pensait plus.
Le 19 avril 2015, après un long combat contre la maladie, Ahmed Laghmani s'est éteint à l'âge de 92 ans. Dans la sérénité, au milieu de ses 5 enfants et sa femme, dans sa maison à Cité Annasr (Tunis). Il a été inhumé le lendemain dans sa terre natale, Zarat, à côté de son neveu Mokhtar Laghmani.
Le cimetière où les deux poètes reposent est à mi-chemin entre la belle plage de la ville et sa non moins belle oasis. Écoutons ce que dit de cette belle amante son achoug:
Oh, m'amie ! ma douce oasis ! quel picaro j'étais !
Je soupirais, étourdi, après des chimères
J'ai musé des années tissant mes illusions
Pour en faire une belle burda pas à ma taille
J'ai battu les chemins, scruté les horizons
Sollicitant un sein comme le tien qui m'abreuve
Mais nulle part, jamais, à l'étau de tes bras
Je n'ai trouvé d'égal et d'aussi chaud, jamais
Ni palmier qui émousse comme le tien la canicule
Ni eau de roche plus limpide que ta source
Ni d'autre bouclier contre l'adversité
Comme la fratrie nourrie à ton lait de palme19
Né à Zarat (autrefois village mais ville aujourd'hui) le 31 mars
A.Laghmani dans sa jeunesse |
Ahmed Amri
18.04.2016
=== Notes ===
1- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011
2- Ibid. Le manuscrit a pour titre عواصف الخريف Tempêtes d'automne.
3- Ibid.
4- Écrit en 1991, le poème يا نازح الدار [Ô toi le transmigré] a bénéficié d'une large diffusion sur les campus universitaires surtout, la censure qui frappait le poète ne permettant pas sa publication par les médias écrits.
5- En arabe زين العرب , littéralement "Beauté des Arabes", surnom donné par Yasser Arafat à Zine el-Abidine Ben Ali.
6- Gentilé des habitants de Zarat dont Laghmani est natif.
7- هواة الأدب , littéralement "Amateurs de littérature" était une émission de radio hebdomadaire dédiée aux auteurs en herbe, que Ahmed Laghmani a co-animée tour à tour avec Mokhtar Hchicha, Adel Youssef et Abdelaziz Kacem.
8- Dans son poème Hafryaton fi jassedin arabi حفريات في جسد عربي (Fouilles dans un corps arabe), on devine à qui s'adresse au juste le jeune poète quand il écrit:
"كلماتك حمرا" قال
فما لـَوْنُ دمي؟
"Tes mots, dit-il, sont rouges !"
Mais quelle est la couleur de mon sang ?
9- De la vie qu'il a traversée vie en météorite, Mokhtar n'a pu donner à l’enseignent que deux mois, hélas.
10- Ya najmna attalîî يا نجمنا الطالع , littéralement Ô notre étoile ascendante, titre d'un poème dédié à Bourguiba, mis en musique par Chedhli Anouar et chanté par Naâma.
11- En arabe: قلب على شفة، تونس -الدار التونسية , 1966. STD, Tunis, 1966.
12- Le poème hommage a été publié dans Assabah du 20 janvier 1977.
فظيع أفول الأهلّة
توارى الهلال ولم يتبرّج سوى بعض ليله
على مطلع شفقيّ البساط
تنفست اللمحات المطلّة...
فكانت عبيرا مشعّ
وكانت ضياء يضوع
وكانت على الأفق شعلة
Source: http://almoktar1963.blogspot.com; page.
13- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011.
14- Le poème en question serait le classique (pour rappel, l'un des sens premiers de ce mot veut dire "s'enseigne en classe") figurant depuis les années 1960 dans nos manuels scolaires: Deux palmiers (جذعان). Il m'a été impossible de vérifier cette information que je tiens de l'un des neveux du poète. En tout cas, c'est soit cette merveille de facture qui a été traduite en 1999 par Jean Fontaine (Histoire de la littérature tunisienne [tome III, p.40/41], Cérès, 1999), soit sa sœur, de même veine: «زاراتُ» إني قد أتيتُكِ ذاكرًا عهد الصبا , Zarat, je suis venu à toi, évoquant ma prime jeunesse, datant elle aussi de la même époque.
15- Si, en arabe سي , est l'abréviation de sayed سيد (monsieur, seigneur) qui a donné "Cid" en espagnol et en français (Le Cid de Corneille), séide aussi, quoique le sens français ait été "corrompu" par Voltaire, ici titre d'un recueil dédié à Habib Bourguiba.
16- Bourguiba a été emprisonné au pénitencier de Téboursouk, puis au Fort Saint-Nicolas de Marseille, ensuite à la prison Montluc à Lyon, enfin au Fort de Vancia dans le département du Rhône. Il a été déporté également au Sud tunisien (3 ans à Bordj le Bœuf), puis à Tabarka, à La Galite et à l’île de Groix.
17- Extrait reconstitué à partir du texte oralisé dans l'émission de télé اليوم الثامن Al-Yawm atthamen [littéralement, Le 8e jour] sur Al-Hiwar Attounsi TV.
18- في بيت الشاعر الكبير أحمد اللغماني - Achourouk du 11.03.2011.
19- Le poème intégral dans ses versions arabe et traduite en fr., sur ce blog.
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