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mardi 3 décembre 2013

5 décembre 1952: assassinat de Hached


A peine une semaine avant sa mort, Farhat Hached racontait à sa femme qu'il a fait un rêve assez curieux. "Il y avait un bateau militaire ancré au port, dit-il, et moi je marchais entre deux rangées compactes de soldats français! je marchais et riais très fort. Suis-je tellement important, me disais-je en rêve, pour que tant de gens s’occupent de moi ?

Hached marchant entre deux rangées compactes de soldats français ! Était-ce une précognition, une perception extra-sensorielle de sa mort, u
n rêve prémonitoire ?


En ce matin du vendredi 5 décembre 1952, il devait être sept heures trente quand, au volant de sa voiture et sous un ciel gris et bruineux, Farhat Hached s'engageait sur la route reliant Radès à Tunis. Bien que prévenu par les lettres de menace et les articles de journaux appelant à sa liquidation, et qu’il ait pris les mesures jugées nécessaires pour se protéger1, ce jour-là  en quittant le domicile qui l'hébergeait  dans la banlieue sud de Tunis il ne soupçonnait pas qu'une voiture le suivait de près. Ni que la mort le guettait à la sortie de Radès.

Depuis plusieurs semaines, voire des mois, Farhat Hached se savait pris en filature. Dès le mois d'octobre, les services secrets français,
à travers un commando venu spécialement de Paris2, l'avaient soumis à une surveillance permanente. Le commando collectait toutes les informations concernant ses déplacements, sa résidence, ses contacts. En même temps, à un niveau plus élevé on étudiait divers plans en vue de contrer le danger que représentait cet homme pour les intérêts de la colonisation. On envisageait tantôt son incarcération ou sa mise sous résidence surveillée, tantôt son éloignement du territoire tunisien ou, tout simplement, sa liquidation physique. Cet ultime recours, dès la fin de novembre 52, semble décidé. Il fallait se débarrasser de Farhat Hached, et le plus tôt possible. D'autant que le combat de cet homme prenait de plus en plus de l'envergure, voire des allures titanesques qui n'inquiétaient plus seulement la France à l'intérieur du territoire tunisien, mais s'étendaient bien au delà des frontières, se répercutant aussi bien sur l'Algérie que sur le Maroc. Parallèlement, le capital de sympathie dont jouissait Hached auprès des organisations syndicales internationales ne cessait de croître, ce qui ne pouvait qu'agacer encore plus l'administration du Résident général et l’État colonial qu'il représentait.

Aussi ne s'étonne-t-on pas si, le 28 novembre 1952, Paris -hebdomadaire nord-africain dirigé au Maroc par Camille Aymard3 - appelait ouvertement au meurtre de Farhat Hached. D'autres feuilles de chou coloniales, à Tunis comme Alger, ont repris cet appel. «Avec Ferhat Hached et Bourguiba, souligne l'hebdomadaire, nous vous avons présenté deux des principaux coupables. Nous en démasquerons d'autres, s'il est nécessaire, tous les autres, si haut placés soient-ils. Il faut, en effet, en finir avec ce jeu ridicule qui consiste à ne parler que des exécutants, à ne châtier que les « lampistes » du crime, alors que les vrais coupables sont connus et que leurs noms sont sur toutes les lèvres. Oui, il faut en finir, car il y va de la vie des Français, de l'honneur et du prestige de la France. « Si un homme menace de te tuer, frappe-le à la tête » dit un proverbe syrien. C'est là qu'il faut frapper aujourd'hui. Tant que vous n'aurez pas accompli ce geste viril, ce geste libérateur, vous n'aurez pas rempli votre devoir et, devant Dieu qui vous regarde, le sang des innocents retombera sur vous4. »

Pourquoi fallait-il "frapper à la tête" Farhat Hached?

En 1952, suite à
l'échec des négociations directes entre les gouvernements français et tunisiens, une vague de répressions s'est abattue sur tous les leaders nationalistes. Bourguiba est arrêté, le gouvernement de  M'hamed Chenik est destitué, le résident général Jean de Hautecloque interdit toute activité politique et instaure le couvre-feu. Les ratissages confiées à la Légion étrangère n'épargnent aucun militant. Plus de 20 000 personnes sont arrêtées. Et seuls Salah Ben Yousef, chargé d'une mission auprès des Nations-Unies, et Farhat Hached protégé par la loi sur les libertés syndicales et bénéficiant du soutien de la CISL, ont encore les coudées franches. Dans ce contexte historique précis, on comprend à quel mobile exact répond l'arrêt de mort contre Hached, couronnant une large vague de répressions. En cette période charnière de l'an 52, l'UGTT et son leader ne sont plus seulement les représentants de la classe ouvrière mais ils sont aussi les véritables acteurs du combat politique, les représentants légitimes du combat nationaliste. Ce sont Hached et ses camarades qui multiplient des contacts avec l'étranger, dirigent secrètement les groupes d'activistes, ordonnent les attaques armées5 contre les symboles de la présence coloniale, organisent des grèves largement suivies qui nuisent aux intérêts du patronat colonial. Avec les fellagas disséminés dans les djebels, la centrale syndicale et son chef sont l'ultime épine au pied que la force coloniale œuvre à arracher. D'où l'exécution à la lettre du mot d'ordre colonial pressant, tel qu'on en a vu la ronflante formulation dans la presse de Camille Aymard et ses amis:" frapper à la tête" Farhat Hached6.

En ce matin du vendredi 5 décembre 1952, le même commando venu spécialement de la France, ou
Villa de Mme Kirsh (Photo Ahmed Manaï)
un escadron de la mort  appartenant à la Main Rouge locale, guettait dès l'aube, et peut-être bien depuis la nuit écoulée, la sortie de Farhat Hached. La filature de la veille localisait ce dernier au 5 rue Maxulla-Radès7
. Se sachant dans la ligne de mire des services secrets français, le leader syndical avait déserté quelque temps plus tôt sa maison située à Bir Tarraz dans la banlieue de Radès. Depuis que cette maison a été saccagée puis fait l'objet d'une tentative de plasticage, Hached et sa famille ont décidé de déloger le quartier Bir Tarraz. Mme Oum El-Khir Hached et les enfants ont été accueillis par des parents vivant à Sousse. Farhat, quant à lui, s'est  réfugié chez des amis vivant au centre-ville de Radès. Tantôt chez  Mustafa Filali au quartier Mongil, tantôt chez les frères Farhat, Abdallah et Mohamed, colocataires d'un petit appartement au premier étage d’une villa appartenant à une Française8. De temps à autre, on le revoyait à Bir Tarraz, chez Mohamed Errai. Comme tout militant sous la traque, Hached faisait ce qu'il pouvait pour semer ses poursuivants. Quelquefois, ceux-ci perdaient ses traces  à Radès. Il était alors à Tunis, rue des Salines, chez un ami commerçant qui s'appelle Sadok Mokadem.

Dans la nuit du 5 décembre 1952, Hached logeait chez Abdallah Farhat et
son frère Mohamed qui habitaient la rue de la Poste, anciennement rue Maxulla. Un quartier plutôt moins arabe que Bir Tarraz, à moins de cent mètres de la gare qui portait le même nom de la rue: Maxulla-Radès. Mustafa Filali habitait lui aussi dans les parages de cette gare. Il faut souligner ici la convivialité, la générosité surtout de ces hôtes frères colocataires, tous deux mariés, et vivant dans 4 pièces partagées, et pas avares pour offrir le gîte à d'autres personnes. Dans cet appartement commun, il y avait une chambre pour Mohamed Farhat et sa femme, une autre pour Abdallah Farhat et sa femme, les deux couples n'ayant pas encore d'enfants. Une troisième pièce servait de salon et salle à manger. Et la quatrième a été offerte à Farhat Hached qui, célibataire en la circonstance, la partageait avec d'éventuels visiteurs venant la plupart du temps du Sahel. Dans sa dernière nuitée chez les frères  Farhat,  Hached a partagé cette chambre  des invités avec Mahmoud Mannai9 qui était de passage chez ses oncles.
D'habitude, Abdallah Farhat qui n'était pas motorisé accompagnait dans sa voiture Farhat Hached. Tous les deux matinaux, ils partaient ensemble à Tunis, le premier vers les P.T.T, le second vers le siège de l'UGTT. Or ce jour-là, le leader syndical dormait toujours quand Abdallah Farhat avait déjà fini son petit-déjeuner. Vraisemblablement, Hached qui était débordé par ses activités syndicales avait besoin de faire la grasse matinée. Abdallah Farhat n'eut pas le cœur de le réveiller. La gare était à quelques pas. Il a quitté l'appartement et pris le train vers la capitale.

Il plaira à de nombreux détracteurs présomptueux de Bourguiba (dont les Frères Musulmans et leurs amis dans la Troïka qui gouverne aujourd'hui la Tunisie) d'extrapoler au sujet de ce fait précis, tentant d'entacher la mémoire de Bourguiba et celle de Abdallah Farhat. Que n'a-ton entendu comme propos farfelus pour diffamer ces deux hommes, en interprétant ce faussement de compagnie fortuit du 5 décembre comme un indice permettant d'incriminer Bourguiba  dans l'assassinat de Hached !
10 Il va de soi que ces calomniateurs, qui reprennent l'une des versions propagées par les services secrets français en vue d'assurer une couverture à leurs hommes de main, ne savent pas, on le présume fort, que Abdallah Farhat était lui aussi un leader syndicaliste, secrétaire général de la Fédération des PTT en 52, puis trésorier de l'UGTT en 53. De même Mustafa Filali le colocataire de Abdallah Farhat. Et puis on oublie que Bourguiba, au moment des faits et bien avant, était déporté. On oublie aussi que ce même Bourguiba était dans le collimateur des assassins de Hachad.



Il devait être sept heures, sept heures un quart, quand Farhat Hached a quitté le domicile de ses hôtes, rue Maxulla. Vu le temps qu'il faisait, il a dû s'engouffrer sur-le-champ dans sa voiture, une Simca des toutes premières générations de la marque. Il a démarré, traversant le quartier Mongil en direction de la R33. C'est l'itinéraire à suivre pour rejoindre la Nationale 1 à destination de Tunis. Hached a-t-il pu se rendre compte, à tel ou tel point de ce parcours, qu'une voiture était à ses trousses? Mais à supposer qu'il l'ait repérée avant sa sortie de Radès, qu'aurait-il pu en déduire, à part que la filature, datant de deux mois au moins, était routinière et que cela ne l'empêcherait pas d'être à Tunis, et aux locaux de l'UGTT, vers le coup de huit heures?


Gare Maxulla-Radès
La journée était froide, le ciel gris. Et il bruinait depuis l'aube sur Radès, un crachin serré et pénétrant. Comme si l'élément naturel, la ville transie de froid, son ciel larmoyant, le vent qui soufflait, ne pouvaient être indifférents à ce qui se tramait contre le chauffeur de la Simca noire, ce bel homme de 38 ans qu'on guettait de si près et qui ne soupçonnait pas le traquenard imminent. Les lourdes nuées noires se tordant à l'horizon, le vent qui gémissait, funeste, les branches d'arbres flageolant ça et là, les feuilles mortes qui tournoyaient en l'air, les perles de pluie roulant sous les essuie-glaces, autant d'éléments semblaient procéder non d'un ordre naturel régi par les lois de la saison, les lois de la météo, mais d'un émoi ineffable, surnaturel, engageant aussi bien l'environnement immédiat, le cadre spatial du crime dont le compte-à-rebours touchait à sa fin, que les forces cosmiques célestes. Comme si l'univers, la Tunisie, ce bout de terre au sud de sa capitale en particulier, appréhendant le tragique, traduisaient ainsi les affres de la mort et du deuil qui les tourmentaient en sourdine.  Radès qui a accueilli le leader syndical, sa femme et leur premier bébé six ans plus tôt avait adopté l'enfant natif de Kerkenna comme le meilleur des siens. Tant il était affable, sociable, si soudé au petit peuple et jouissant du respect de tout le monde. Tant petits et grands de ceux qui ont pu le connaître de loin, ou le côtoyer de plus près, l'aimaient. Tant il était généreux, prodige. Quand en 47, alors âgé de 32 ans, Hached fut élu à l'unanimité comme premier secrétaire général de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) dont il était le principal fondateur, c'était sur Radès qu'il a jeté son dévolu pour y élire domicile. Il devait déménager de Sfax afin d'être à proximité de la capitale et des bureaux de la centrale qui l'a désigné pour la diriger. Quand il s'est installé au quartier Bir Tarraz, son petit Noureddine avait 3 ans. En 48, le couple Hached a eu un deuxième garçon, appelé Naceur. Deux filles suivront, Jamila et Samira, respectivement en 49 et 52. La petite Samira avait juste trois mois ce 5 décembre fatidique. Et leur maman Oum El-Khir, Mme Hached, n'avait que 22 ans.

A peine engagé sur la route de Tunis, Farhat Hached entend résonner des rafales de mitraillettes derrière lui. Il s'aperçoit vite que c'est lui qu'on cible par tel feu. Touché et perdant le contrôle du volant, il laisse sa voiture heurter la bordure élevée de la route et caler. Les auteurs de la fusillade ne s'arrêtent pas, prennent aussitôt la fuite, s’éloignant à vive allure.

A ce stade de l'opération, Farhat Hached est sous le choc certes, mais juste blessé à l'épaule et à la main.
L'impact des balles sur sa voiture témoignera cependant de la violence de la fusillade. Vingt-huit balles -au moins- auraient été tirées sur le véhicule. Avec des "si" on mettrait peut-être la mort en bouteille, dirait-on. Néanmoins, le leader syndical aurait peut-être pu déjouer le plan de ses assassins s'il n'avait pas quitté sa voiture, s'il avait pu flairer que les assassins, les mêmes ou un autre groupe, reviendraient à la charge. Mais parce qu'il était vigoureux, qu'il avait une carrure d'athlète et que la mort voulait lui accorder ce bref sursis pour le prendre debout, Farhat Hached est sorti de la voiture et il a dû marcher un peu. Peut-être a-t-il eu le temps de voir l'impact des balles sur la tôle. Peut-être a-t-il eu le temps de remercier cette tôle qui lui a permis de rester en la circonstance debout.
Toujours est-il qu'en ce moment-là précis, une camionnette s'est arrêtée derrière lui. Et alors que le chauffeur lui proposait de l'emmener à l'hôpital, une deuxième voiture venant en sens inverse s'est arrêtée à sa hauteur. Deux ou trois individus s'étaient saisis de Hached. Pour le chauffeur de la camionnette, ces "âmes secourables" serviraient mieux que lui le blessé. Ils embarquent Hached et repartent en flèche. Quelques heures plus tard, on retrouvera Hached criblé de plusieurs balles à l'abdomen. Et d'une balle à la tempe. Cette fois-ci, la consigne des journaux appelant à "frapper Farhat Hached nommément à la tête" a été pieusement suivie.




Ils ont tué Hached en Tunisie comme Jaurès et Ben Barka en France. Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht en Allemagne. En Italie, Giacomo Matteotti. Et dans d'autres continents, Guevara, Patrice Lumuba, Thomas Sankara.
Ils ont tué par le passé, comme de nos jours ils tuent encore où bon leur semble. Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, que l'on ne s'y trompe pas, si on les avait tués il y a moins d'un an en Tunisie, c'est parce qu'ils ne se battaient pas pour l'intérêt d'une secte, d'une confrérie, ni d'une caste. Mais pour une société égalitaire, progressiste, démocratique et ouverte sur le reste du monde. C'est-à-dire humaniste. Les assassins de ces diverses figures du socialisme n'ont peut-être pas le même épiderme. Peut-être la bannière sous laquelle ils revendiquent leurs crimes n'est-elle pas nécessairement uniforme. Mais c'est le
même sein et venin qui les nourrissent partout. La même peste noire est leur mère commune. Sous quelque latitude qu'ils soient. Et quels que soient le temps, le continent et le pays où il sévit et tue, le fascisme a la même religion. Il est l'ennemi du genre humain.

Ils ont tué Hached. Mais les répercussions de cet assassinat sont telles que Hached mort se révèle tout aussi
catalyseur de combat que vivant. C'est la graine qui meurt pour que naisse l'épi. A midi, quand la radio annonce la nouvelle, c'est tout le pays qui se soulève. Le Maroc le suit instantanément avec des émeutes sanglantes faisant 40 morts et des centaines de blessés. L'Algérie ne reste pas à l'écart, qui sera secouée par des troubles durant plusieurs jours. Des manifestations s'improvisent dans plusieurs capitales et villes du monde: le Caire, Damas, Beyrouth, Karachi, Jakarta, Milan, Bruxelles, Stockholm. Des grèves partielles sont décrétées dans de nombreux pays, y compris aux USA. Plusieurs personnalités françaises dénoncent cet assassinat. Et le martyre de Hached devient levier politique grâce auquel le processus d'indépendance sera accéléré.

En guise d'entrée à cet article, nous évoquions un rêve prémonitoire.
Farhat Hached n'a pas eu droit à des funérailles, ni même à une inhumation dans un cimetière11
. Néanmoins, le lendemain même de son assassinat sa dépouille a été transférée en grande pompe vers la Goulette. Et de là à Kerkenna, ville natale du martyr, sur une corvette de la marine militaire française.


A.Amri
3 décembre 2013




Notes:

1- Il faut remercier ici notre ami Dr Ahmed Manaï à qui je dois un tas d'informations guidant cet article. Il y a un an, sur mon compte Facebook je publiais la première mouture du présent article. Et cet ami a eu
l’amabilité de m'éclairer sur certains points, entre autres que feu Hached, contrairement à ce que j'avançais, a pris des mesures préventives avant son assassinat, qu'il n'habitait plus à Bir Tarraz dans la banlieue de Radès mais, au jour le jour, chez divers amis et que son propre frère feu Mahmoud Manaï était parmi les dernières personnes à avoir côtoyé le martyr.   Dr Ahmed Manaï a pu lui-même connaitre de près le martyr, à la faveur de sa parenté avec feu Abdallah Farhat son oncle. C'est à Farhat Hached que le petit Ahmed Manaï qui fréquentait le kuttab, école coranique, doit sa conversion à l'école publique. Ce même enfant, après les funérailles du martyr, a raccompagné la veuve Oum El-Khir Hached et ses enfants pour soutenir quelque temps, dans leur maison réintégrée à Radès, Noureddine et Naceur.

Dr Ahmed Manaï sur ce même blog:

  -
La liberté d’expression et la responsabilité de l’intellectuel musulman 
- Marzouki s'est tu au moment où il devait parler (par Dr Ahmed Manai)
  -Blog de l'Institut Tunisien des Relations Internationales

2- C'est ce que révèle un document fourni
à Noureddine Hached par  le président français François Hollande lors de sa visite en Tunisie, les 4 et 5 juillet 2013. Dans l'attente de la levée du secret sur ce dossier qui devrait marquer la commémoration du 61e anniversaire de l'assassinat de Hached, vraisemblablement la Main Rouge, longtemps présentée comme l'auteure de cet assassinat, ne serait qu'une couverture à un crime d’État. 

3- Ancien magistrat en Indochine compromis dans l'affaire Stavisky,
Camille Aymard a dirigé de nombreux journaux orduriers de l'extrême droite française et publié des livres mettant en garde contre le péril rouge. Dans la perception de ce fasciste et ardent défenseur du colonialisme, le combat du leader syndical tunisien ne pouvait s'inscrire que dans le prolongement de ce péril menaçant la France.    

4-
Abdelaziz Barrouhi et Ali Mahjoubi, « Justice pour Farhat Hached », Jeune Afrique, 21 mars 2010, p. 48.

5-
Dans l'histoire du Mouvement national tunisien, il y a une thèse -répandue surtout chez certains détracteurs du mouvement syndical- qui veut nous persuader du caractère autonome de la guérilla et l'absence de toute coordination avec les chefs du combat politique ou syndical. C'est ce que Lotfi Zitoun déclare dans un documentaire consacré à l'assassinat de Hached et produit par Al-Jazeera en 2011. Or dans ce même documentaire, Ahmed Ben Salah révèle des messages chiffrés qu'il recevait de Farhat Hached réclamant "du piment", ce qui signifie -selon les dires de Ben Salah- des actions armées de la part des fellagas.
Bourguiba lui-même, au lendemain de la signature par Robert Schuman (15 décembre 1951) d'un mémorandum affirmant « le caractère définitif du lien qui unit la France à la Tunisie », déclarait das un message en partie adressé aux fellagas que ledit mémorandum ouvrait « une ère de répression et de résistance, avec son cortège inévitable de deuils, de larmes et de rancune ».
6- Tahar Hmila, doyen des membres de la Constituante, est la plus récente illustration à ce propos.
"Farhat Hached, dit-il dans une interview accordée le 23 novembre 2011 à la radio Shems FM, avait l’habitude d’être accompagné sur son chemin vers le syndicat par Abdallah Farhat, sauf le jour de son assassinat. Pourquoi ? Était-ce une coïncidence?" Les insinuations de ces interrogations se passent de tout commentaire. Il n'y a pas de fumée sans feu, semble nous dire Tahar Hmila.

7- Le nom de Maxulla, tiré de l'expression latine Maxula per rates (Maxula par les bacs), était le nom d'origine libyco-berbère de Radès.

8- Il s'agit de Mme Kirsch qui vendra plus tard sa villa aux frères Farhat.

9- Il n'est pas exclu que l'un des objectifs de l'assassinat de Farhat Hached soit "la prévention du péril rouge" dans une future Tunisie indépendante. Le spectre qui hante la vieille taupe, selon l'expression du Manifeste rédigé par Engels et Marx, apparait lancinant dans les écrits de Camille Aymard cité plus haut. Par ailleurs, le témoignage sur Al-Jazeera d'Antoine Melero auteur du livre la Main Rouge, l'armée secrète de la République, corrobore cette thèse. Selon Melero, l'Etat français voulait conjurer l'accession par Hached à la présidence d'une Tunisie indépendante, laquelle accession entraînerai un régime socialiste. 

10- A l'époque postier de profession, Mahmoud Manaï décédé en octobre 1994, a eu l'ingrate mission, ce 5 décembre 1952, de faire le déplacement à Sousse pour annoncer la triste nouvelle à Mme Hached.


11- Le pays étant soumis depuis quelque temps à un couvre-feu, à quoi ajouter les émeutes en tout lieu déclenchées par l'assassinat de Farhat Hached, la famille Hached s'est vu intimer l'ordre d'enterrer sans cérémonie le martyr dans le jardin de la maison. En 1955, alors que la Tunisie a acquis l'autonomie interne, la dépouille a été exhumée et transférée au cimetière Al-Jallaz à Tunis. C'est au cours de ce transfert que le monde a pu mesurer l'attachement des Tunisiens au disparu. De Sfax à Tunis le long de la Nationale 1, on a vu le peuple apothéosant son martyr. Puis au cimetière des funérailles nationales comparables à celles de Chokri Belaïd, le Hached de la révolution tunisienne.

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