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mercredi 14 mars 2018

Icônes dacryogènes

La corde du mensonge est courte, assure la vieille sagesse des Arabes. Courte aussi, quand on parle de la guerre en Syrie, la vie des icônes que fabriquent l'industrie impérialiste du consentement et -pour reprendre une expression bien tournée de Bruno Guigue (1)- "les idiots utiles du « regime change »".

Il y a juste trois semaines, une vidéo "dacryogène" publiée sur Youtube a fait encore le tour du monde. On y voit une fillette du nom de Sondès, interpellant depuis son abri de fortune à la Ghouta orientale la conscience du "monde libre". Pleurs chauds et hauts cris entrecoupés de hoquets sollicitaient les d'Artagnan de ce monde d'intervenir pour sauver les enfants de la Syrie.

Et pas plus tard qu'hier, cette même Soundès est réapparue, cette fois-ci à la télévision syrienne et sous un autre jour, pour crier:" vive l'armée arabe syrienne et que Dieu préserve la Syrie!"

A peine née, l'énième icône(2) des contempteurs de Bashar se retourne contre ses producteurs. Comme pour Zainab al-Hosni, Omran Daqneesh, Amina Abdallah, et j'en oublie sûrement tant la liste est longue, ce nouveau tire-larmes concocté par les séides de l'impérialisme se révèle après coup contre-productif. Non seulement il s'est vidé de sa charge émotionnelle par l'icône devenue en quelque sorte "transfuge", mais il pourrait même désormais générer l'effet pervers d'un gaz hilarant.

Mon propos n'est pas de tourner en dérision le drame et les affres, réels, de tant de civils syriens en détresse, à la Ghouta ou ailleurs. Mais de crier haro sur l'écran de fumée qui cache, tronque, tord le cou à la vérité: le mensonge systématique organisé, occultant à chaque fois les véritables artisans du malheur syrien. 

Qui, de l'armée arabe syrienne et des groupes armés, tient à sa merci les civils de la Ghouta? Qui empêche ces civils d'être évacués loin des groupes armés? Qui les utilise comme otages, prises de bonne guerre, boucliers humains et monnaie d'échange pour une éventuelle capitulation? Voilà des questions que les pondeurs de ces vidéos de propagande instrumentalisant la détresse civile syrienne passent méthodiquement sous silence. On veut nous persuader que les groupes terroristes qui, en désespoir de cause, jouent le tout pour le tout afin de retarder autant que possible leur déroute certaine, ne sont pour rien dans la rude épreuve frappant les civils. Ici et en toute circonstance analogue, seuls le méchant Bashar et la non moins méchante son armée peuvent être pointés du doigt.

Ahmed Amri
14.03.2018

1- Je rappelle à mes chers amis tunisois que Bruno Guigue sera parmi nous du 19 au 21 mars courant et qu'il donnera une conférence en date du 19 à la Librairie copie (Ennasr Tunis) suivie d'une séance de dédicaces pour son livre "Chroniques de l'impérialisme et de la résisatnce" en version arabe.
2- Sur la fabrication d'icônes et le mensonge organisé en vue de donner aux puissances impérialistes un casus belli contre Bashar, le livre de François Belliot, Guerre en Syrie, dont je ne saurais trop recommander la lecture, fournit mille et un exemples amplement documentés et commentés. Ce livre est disponible en librairie, dans son édition tunisienne (ITRI, 2017)


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