vendredi 13 mars 2020

Coronavirus: la prévention par l'hygiène bucco-nasale

"L'hygiène buccale, les bains de bouche et le gargarisme sont les recommandations les plus importantes qui m'ont été faites par les médecins pour prévenir les infections transmissibles par l'appareil respiratoire ou la bouche." Abd al-Razzāq Nawfal, (1917-1984) [1]


Entre autres règles préventives du coronavirus [2], on préconise le nettoyage régulier des mains, soit avec de l'eau et du savon, soit avec un liquide antiseptique, soit encore avec du gel hydroalcoolique.

Et l'on ne dit rien, curieusement, à propos de la bouche et du nez. Comme si les mains seules seraient contaminables, ou que la bouche et le nez seraient constamment sous le masque anti-viral, ou encore que ce masque ne serait pas à son tour contaminable.

Or, il est de tout intérêt de souligner que le masque, issu du prototype chirurgical, n'a pas été conçu pour protéger son porteur. Le médecin et son équipe opératoire s'en servent à seule fin de préserver la personne opérée, contre les risques d'éventuelles infections, suite à leurs propres éternuements ou toux. Il faut souligner aussi que les masques de ce type, soumis aux contraintes vitales de la respiration, sont tous, à des degrés divers, infiltrables. Et les meilleurs, et dans les conditions les plus optimales -en fin de compte, sont plus ou moins comparables au filtre à air d'une voiture: celui-ci retient les impuretés, les poussières, les particules solides d'une certaine taille, mais ne peut les détruire ni les extraire et acheminer vers l'extérieur, comme la fumée sortant du tuyau d'échappement. Pas plus qu'il ne peut arrêter les particules microscopiques, indécelables à l’œil nu. Et si ce filtre à air n'est pas entretenu de façon périodique, ou remplacé au bout d'un certain parcours, ces particules, quelle qu'en soit la masse, peuvent affecter la santé du moteur. 

Cette analogie des
masques anti-viraux avec la pièce mécanique devrait être encore relativisée. Destinés à un usage unique et n'étant pas nettoyables, les masques ont une durée d'emploi assez limitée, trois heures environ, après quoi il faut les jeter. Et, vu la psychose planétaire du coronavirus, que ce soit en Europe ou ailleurs, en pharmacie ces masques semblent de plus en plus difficile à trouver. Et quand on les trouve, ils sont à des prix de moins en moins abordables, surtout pour les gens de condition modeste.

Mais que devons-nous retenir de cette comparaison ? L'essentiel qui suit. Vous rentrez chez vous pour vous débarrasser d'un masque qu'une sortie impérieuse vous a imposé. Lorsque vous l'ôtez pour le jeter, on vous recommande de vous laver auparavant les mains. Lavez-les; ôtez votre masque; relavez vos mains; mais sachez que vous n'en serez pas quitte pour les risques de contamination. Votre nez et votre bouche, qui sont à moins d'un mètre [3] de vos mains, peuvent avoir été contaminés aussi. Sans compter le reste du visage, la tête et les vêtements. Et comme le degré de filtration des masques varie entre 78% et 98% [4], le risque de contamination directe par ce masque censé vous protéger peut aller aussi de 2 à 22%. 

En prenant en considération tout ce qui précède, il y a lieu de se demander si la négligence, parmi les mesures préventives prônées, de l'hygiène bucco-nasale, voire corporelle intégrale (douche, bain),  ne constitue pas, à bon droit, l'un des facteurs déterminants dans la propagation du coronavirus.

Parce que les spécialistes sont persuadés que l'agent de transmission virale principal est le toucher, soit de personnes infectées par le virus, soit d'objets contaminés [5], on n'a pas songé à "compliquer la vie" des gens par des mesures hygiéniques estimées superflues, alors qu'elles ne sont pas moins salutaires, à mon sens, parce que plus efficaces. Au vu même des "gestes barrières" que, partout, on appelle à renforcer, des nettoyages et des aseptisations qui nous rappellent tant de films américains de science-fiction, et du fait que les poumons constituent le premier foyer d'infection virale et de ses complications, personne parmi ces spécialistes ne serait en mesure de dire, sur des bases probantes, que la simple respiration ne soit pas elle aussi agent de transmission.

A ce propos précis, notons d'abord que notre corps est naturellement doté de son filtre à air, qui fonctionne en gros comme un masque, une sorte d'antiviral intégré à nos voies respiratoires. Quand vous respirez, il y a des milliers de particules qui pénètrent dans votre nez, en même temps que ce corps gazeux appelé air. Et ces particules passent par une douane, des barrières à l'intérieur de vos narines et d'autres dans les replis des muqueuses tapissant votre gosier. Si, par exemple, vous éternuez par allergie à un  pollen, une fumée, une poussière, c'est que la douane en question a refoulé des corps jugés irrecevables, des étrangers sans visa. Et quand vous vous mouchez, vous constatez qu'il y en a encore d'autres corps auxquels cette même douane a refusé le droit d'entrée vers vos poumons. Mais un papier-mouchoir ne suffirait pas à "mettre en corbeille" tout ce que votre nez parque sous l'humeur (glaireuse ou liquide) d'"intrus indésirables". Les virus, un peu à la manière des terroristes bien rodés, peuvent temporiser, rester en travers de ces barreaux que sont les poils de vos narines et y squatter, en attendant le moment propice pour franchir tel bouclier. D'autres, ceux qui s'infiltrent à travers la bouche, sont obligés de se tapir quelque part dans votre gosier, si le mécanisme de l'occlusion du larynx, quand vous mangez, ne les détourne immédiatement vers votre estomac.

Quand on parle de coronavirus, ce filtre à air est, en vérité, votre premier "masque anti-viral". Si le lavage des mains, pour ne pas parler du reste du corps, est incontournable afin de prévenir de ce côté précis le risque de virulence, il n'en reste pas moins que les organes les plus proches de vos poumons ne sont pas les mains. Or, pour renforcer la sécurité de ce masque naturel, comme vous ne pouvez pas le remplacer à la manière d'un filtre pour voiture, vous devez l'entretenir de façon systématique, plusieurs fois par jour, afin d'en déloger à temps les "squatters" dont on parle. 


C'est à ce niveau préventif précis qu'intervient l'hygiène bucco-nasale, laquelle, quoi-que de tout intérêt dans le processus immunitaire,  est quasiment absente dans les recommandations que méde-cins et médias nous serinent, à longueur de journées, depuis le début de cette épidémie. Le gargarisme conjugué au rinçage du nez, opérations appliquées de façon systématique au quotidien, sont d'autant plus recommandés qu'ils ont déjà fait leurs preuves contre certaines pathologies infectieuses comme les angines à streptocoque.

En quoi consiste le gargarisme [6]?


"Les gargarismes, écrit  Alexandre Jamain, sont des liquides simples ou médicamenteux dont on se sert soit pour laver la bouche et le pharynx, soit pour agir sur la muqueuse de ces cavités. Quand on veut se gargariser, on prend dans sa bouche une petite quantité de liquide et l'on renverse la tête en arrière; la base de la langue, venant s'appliquer sur la paroi postérieure du pharynx, empêche le liquide d'être avalé; puis on chasse lentement l'air qu'une longue inspiration avait accumulé dans les poumons. Cette expiration imprime de légères secousses au liquide et détermine un bruit particulier de glouglou. De cette manière, l'isthme du gosier et la partie moyenne du pharynx se trouvent humectés par le liquide du gargarisme. Comme il est impossible de faire une inspiration pendant qu'on se gargarise, on ne peut prolonger longtemps cet exercice; d'ailleurs les muscles, étant dans un état de contraction permanente, ne tarderaient pas à se fatiguer considérablement. Le gargarisme se compose en général de 150 grammes de liquide; le malade doit se gargariser de six à huit fois par jour, selon les indications."[7]

Et le rinçage du nez ?

La méthode la plus simple consiste à verser au creux de la main un peu d'eau, puis d'en aspirer, tête légèrement inclinée vers le haut, de quoi se remplir les narines et d'expirer aussitôt cette eau en se mouchant fortement à l'aide de deux doigts. L'opération doit se répéter trois fois au moins pour un seul rinçage efficace. Et trois rinçages par jour, dont le dernier avant de se coucher, devraient suffire. Il existe aussi des canettes nasales, petits récipients en plastique, spécialement conçus pour le nettoyage du nez, mais l'inhalation et l'expiration répétées et suivies de mouchage sont plus recommandés.

En guise conclusion, je voudrais établir un lien entre le propos de cet article et le témoignage que j'ai reçu d'un ami et publié sur ma chaine Soundcloud. 






A. Amri
12.03.2020


Notes:
1- L'islam et la science (en arabe), al-Nāshirūn al-ʻArab, 1971, p. 146.

2- Je copie ici les 10 recommandations faites par le site médical doctissimo:
   " -Bien se laver les mains, le premier geste-barrière
    - Le gel hydroalcoolique, un allié face aux épidémies
    - Le masque, dans certains cas seulement
    - Ne pas se toucher le visage
    - Nettoyer régulièrement les surfaces et les objets courants
    - Éviter les contacts proches
    - Eviter les lieux très fréquentés, en particulier les hôpitaux
    - Éviter de consommer des produits d’origine animale crus ou mal cuits
    - Respecter les règles d’hygiène en cas de toux
    - Que faire en cas de risque d’exposition au virus ? (Respecter la période d'incubation [15 jours],  si  des symptômes (fièvre, toux ou dyspnée) de coronavirus apparaissent, appeler le 15.)" 


3- Pour se faire une juste idée de ce risque, il faut savoir qu'en Italie, ces jours-ci, dans les commerces encore ouverts ou dans la rue, pour parler à quelqu'un vous devez garder une distance minimale de 3 mètres, périmètre de sécurité à la fois pour vous et pour votre locuteur. 

4- Masque de protection contre le coronavirus

5- "La COVID-19 est transmise par des personnes porteuses du virus. La maladie peut se transmettre d’une personne à l’autre par le biais de gouttelettes respiratoires expulsées par le nez ou par la bouche lorsqu’une personne tousse ou éternue. Ces gouttelettes peuvent se retrouver sur des objets ou des surfaces autour de la personne en question. On peut alors contracter la COVID-19 si on touche ces objets ou ces surfaces et si on se touche ensuite les yeux, le nez ou la bouche. Il est également possible de contracter la COVID-19 en inhalant des gouttelettes d’une personne malade qui vient de tousser ou d’éternuer. C’est pourquoi il est important de se tenir à plus d’un mètre d’une personne malade." Maladie à coronavirus 2019 (COVID-19).

6- Même si mon propos ici n'est pas de défendre une étymologie [I],[II],[III], le gargarisme, mot issu de l'arabe غرغرة  gharghara (dont le sens est traduit par Antoine Paulin Pihan: "faire entendre un bruit de gargarisation ou un roulement de voix dans le gosier; râler, en parlant d'un agonisant", a été largement traité dans les ouvrages de médecine arabe médiévale, et le mot est attesté dans près de 80 occurrences réparties entre Razi, Avicennes, Al Baïtar, Jaber...

7- Manuel de petite chirurgie, Paris, 1873, p. 73.

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