Encore une hostie sur l'autel expiatoire et propitiatoire du feu. Encore un feu frère aux feus Bouazizi et ses frères de feu...
Ce matin comme tant d'autres baignés de tristesse et sentant le rossi, sorti des faits divers le temps d'un flash qui passe, avare de son temps précieux: un frêle corps a brûlé. En fin d'infos servi, diligemment à l'heure du déjeuner, comme pour nous titiller duvet de nuque et les narines.
Ce n'était ni à la tombée du jour. Ni au fort de la nuit. Ni, noir et par un soir raffolant d'encens qui moutonne, un chevreau. Ou toute autre hostie expiatoire ou propitiatoire pour notre salut.
Pouvant sortir le pays de ses tribulations. Exaucer les vœux dévots à ne plus susurrer aux saints Sidis et leurs séides thuriféraires, les uns comme les autres faisant la queue à la file des chômeurs, leurs cartes et marabouts étant brûlés. Embaucher les élus du chômage que leurs Élus n'entendent plus, fort à propos -il faut dire, car ne les retrouvant plus dans les dernières statistiques revues de près et corrigées. Résoudre les problèmes de l'économie en passe d'être toute résolue. Faire pleuvoir dru sur la Tunisie l'or qu'attendent en file indienne tuk-tuk importés depuis la Thaïlande pour le bonheur du tunisien eldorado.
Mais au grand jour, et tout aussi vert que le dernier, pas moins vert que le premier, un jeune brûlé par le pyromane et tunisien désespoir.
Sans être noire hostie chargée de nos péchés, il a déposé dans le vase des cendres victimaires ses peines et nos fautes. Sur le bûcher des dieux chthoniens qui raffolent de la tendre chair nôtre, il s'est offert corps et biens perdus méchoui accommodé aux essences pétrolières, grillade de foie salée et tête aux quatre épices avec le chou-fleur de la cervelle, propitiatoire et devant allécher la pluie qui boycotte printemps et sa terre. Et faire baisser d'un cran le prix des denrées qui nous flambent, et mangent toutefois crus.
Sans préjuger, à en juger toutefois par l'affluence vers les mosquées à l'heure où l'encens du corps moutonne, dans l'enchantement des dieux chthoniens. Et l'indifférence des minarets pressant vers la prière ses fidèles.
Frêle comme le feu dernier et tous les feus frères de feu, sur le bûcher de notre misère. Un autre frère à Bouzizi.
Un bout d'enfant comme tel, au bout du chemin et du rouleau, venant à bout de la vie qui, pour l'avoir trop supporté, n'en voulait plus de lui.
Dis-moi, petit frère, jusqu'à quand devrons-nous, sur l'autel de ces dieux humains qui insultent notre misère, immoler des Bouazizis? Jusqu'à quand permettre que soient grillés par le feu nos oisillons et leur duvet? Et la coque à peine éclose de nos œufs couvés?
Jusqu'à quand, petit frère, intenter contre la misère abstraite de ses orfèvres, contre seulement ses outils d'orfèvres, la charrette, le chariot des sandwichs ambulants, la mallette des parfums diplômés, le renommé carton à cigarettes bédouines qui sillonnent les rues, la citadine caisse à cirer bivouaquant dans les parages des cafés, aux cafés la chaise louée à l'année sans l'acquit et la quittance, la mendiante tzigane et les Gavroches des rues à arpenter d'impasse en impasse, sans y jamais capturer vif bout d'espoir, sans jamais vive bout d'espérance. Et le silence qui sirote à petites lampées et grandes nos vies, et la cadence des portes refermées sitôt on y frappe. Et les lettres jamais rendues par facteurs et PTT, mortes closes sitôt timbre aux PTT payé et tamponné?
Et ces procès que nous intentons contre l'indifférence, le silence, la mort, par nos corps devenus insupportables, invivables, sans la dignité qui les fasse tenir debout?
Jusqu'à quand, petit frère, intenter ces procès coûteux et sans verdict de justice contre les fourchettes et les couteaux des pyromanes. Et mythomanes. Et mégalos aux chaises trouées qui dans l'aisance rotent et nous découpent. Et sans Dieu pour déposer contre eux?
Sans Dieu à chaque fois, toujours absent, jamais convoqué pour comparaître à la barre des témoins et montrer du doigt ses pyromanes assassins.
Ils sont là, petit frère, assis à l'ombre de l'Absent, les superbes présents d'Allah qui nous comblent! Sans présents -ni le présent qui les voie- pour la bouche épouse de ramadan. Sans présents à part l'absolue prédication de Sa parole absolutoire. Qui ne permette à épouse de cocufier son ramadan!
Là, qui nous mènent à tous les abattoirs, tantôt à la prompte massue qui ne sait lire ni écrire(*), pour notre salut éternel -disent-ils, tantôt à la douceur des maux qui nous laminent, à la divine piqûre de fatwas, toutes aussi promptes que la massue, qui "la" piquent et nous la massent!
Là, toujours diligents, petit frère, pour nous mener droit au paradis, et dans la camisole de force, à nos fers ferrés. Sinon l'enfer nous voyant fourvoyés sur le chemin, au dernier mangera ceux qui auront survécu aux bûchers terrestres!
Écoute le mufti qui roucoule, cravachant nos maux! Regarde-le nous montrant de la pointe du sceptre qui soulève ses bas côtés à l'ample robe des cieux, gracieuses à qui les brigue et mande au bout du chemin des méritants, au milieu du jardin mérité, de mille bassins et fontaines dorées entourées, les douceurs divines!
Regarde, petit frère, sous les basques qui s'évasent, ce que nous réservent les divines alcôves qui nous enchantent!
"Et hue! dia! croyants! Vous en voulez ou pas de ces douceurs divines?"
Les appas et l’appât que marchands d'illusions nous injectent dans leurs piqûres. Pour nous décapiter. C'est qu'ils nous veulent tous des Bouts à zizi, comme Mohamed Bouazizi mais sans la tête! Pas cogitant du tout, à la rigueur si cogiter nous tente, ne cogitant que par le tronçon de chair retranché de son bout!
C'est pourquoi, outre les bûchers sataniques de Bouazizi et ses frères de feu, ils ont inventé, sacrés, les bûchers de la haine divine. Des tonnes de Bouzizis s'y jettent au fil des jour, entre les ablutions de la prière matinale et la prière qui scelle le jour. Tandis que d'autres bienheureux attendent leur tour. Tous, dieu merci, rachetables à l'enfer promis pour autant qu'ils acceptent qu'on leur retranche, à coups de piqûres endormant le cogito temporel et profane, à chaque Bouzizi le tronçon de bout qui pense. Tandis que l'autre, que la géhenne du mufti ne menace de ses braises ni tance, droit et tout ouïe à la coquetterie céleste, aux houris qui minaudent et l'appellent, panse ses maux et leur susurre à mufti le baume de ses dits.
"Va, petit frère, bondis, saute au paradis qui te hèle!" Et le coton céleste, son satin et ses fanfreluches, te tirent du nez. Jihad en Syrie! en série jihad partout! souris aux anges, petit frère, bout de chair martyre qu'on panse! danse autour du feu, le temps que là-haut les promises t'allument un bâton d'ambre! Panse ton machin le temps qu'elles préparent au sultan son bain ambré.
Puis.. au feu! et que ça saute!
Au suivant!...."
Ils sont là, petit frère, assis à l'ombre de l'Absent, les superbes présents d'Allah qui nous comblent! Les pyromanes qui brûlent et fument nos phénix. Et qui clappent et se pourlèchent, tout le temps que le doux fumet leur titille mèches de saints et les naseaux. Ils reniflent haut l'eau de notre sel, le zeste de notre citron et les senteurs zélés de l'estragon au jus de cumin. Ils renâclent fort les essences des hosties, l'eucharistie qu'exhale, toute vertu, nos bûchers. Et quand nos cendres sont servies après dessert aux agapes, à pailles et pincées dévotes se disputant la poudre noire d'Afghan, ils sniffent et crient: Allahou akbar! Dieu est grand!
Jusqu'à quand, petit frère brûlant vert pour les agapes de nos saigneurs, le théâtre de Beckett à vivre guichets fermés, à répéter jour et nuit, à la vie, au théâtre à ciel ouvert de la vie? A quand Fin de Partie sans le noir théâtre, petit frère, et l'absurde noir pour metteur en scène?
Quand enfin ces procès que réclame ayants-droits et les âmes de leurs damnés, qu'il faut engager ici et maintenant contre le désespoir, ses artisans et ses apôtres?
A.Amri
12.03.2013
http:// www.jeuneafrique.com/ Article/ ARTJAWEB20130312100511/
*- Expression empruntée à l'arabe لا تقرا لا تكتب, qui signifie:" impitoyable"
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Ce matin comme tant d'autres baignés de tristesse et sentant le rossi, sorti des faits divers le temps d'un flash qui passe, avare de son temps précieux: un frêle corps a brûlé. En fin d'infos servi, diligemment à l'heure du déjeuner, comme pour nous titiller duvet de nuque et les narines.
Ce n'était ni à la tombée du jour. Ni au fort de la nuit. Ni, noir et par un soir raffolant d'encens qui moutonne, un chevreau. Ou toute autre hostie expiatoire ou propitiatoire pour notre salut.
Pouvant sortir le pays de ses tribulations. Exaucer les vœux dévots à ne plus susurrer aux saints Sidis et leurs séides thuriféraires, les uns comme les autres faisant la queue à la file des chômeurs, leurs cartes et marabouts étant brûlés. Embaucher les élus du chômage que leurs Élus n'entendent plus, fort à propos -il faut dire, car ne les retrouvant plus dans les dernières statistiques revues de près et corrigées. Résoudre les problèmes de l'économie en passe d'être toute résolue. Faire pleuvoir dru sur la Tunisie l'or qu'attendent en file indienne tuk-tuk importés depuis la Thaïlande pour le bonheur du tunisien eldorado.
Mais au grand jour, et tout aussi vert que le dernier, pas moins vert que le premier, un jeune brûlé par le pyromane et tunisien désespoir.
Sans être noire hostie chargée de nos péchés, il a déposé dans le vase des cendres victimaires ses peines et nos fautes. Sur le bûcher des dieux chthoniens qui raffolent de la tendre chair nôtre, il s'est offert corps et biens perdus méchoui accommodé aux essences pétrolières, grillade de foie salée et tête aux quatre épices avec le chou-fleur de la cervelle, propitiatoire et devant allécher la pluie qui boycotte printemps et sa terre. Et faire baisser d'un cran le prix des denrées qui nous flambent, et mangent toutefois crus.
Sans préjuger, à en juger toutefois par l'affluence vers les mosquées à l'heure où l'encens du corps moutonne, dans l'enchantement des dieux chthoniens. Et l'indifférence des minarets pressant vers la prière ses fidèles.
Frêle comme le feu dernier et tous les feus frères de feu, sur le bûcher de notre misère. Un autre frère à Bouzizi.
Un bout d'enfant comme tel, au bout du chemin et du rouleau, venant à bout de la vie qui, pour l'avoir trop supporté, n'en voulait plus de lui.
Dis-moi, petit frère, jusqu'à quand devrons-nous, sur l'autel de ces dieux humains qui insultent notre misère, immoler des Bouazizis? Jusqu'à quand permettre que soient grillés par le feu nos oisillons et leur duvet? Et la coque à peine éclose de nos œufs couvés?
Jusqu'à quand, petit frère, intenter contre la misère abstraite de ses orfèvres, contre seulement ses outils d'orfèvres, la charrette, le chariot des sandwichs ambulants, la mallette des parfums diplômés, le renommé carton à cigarettes bédouines qui sillonnent les rues, la citadine caisse à cirer bivouaquant dans les parages des cafés, aux cafés la chaise louée à l'année sans l'acquit et la quittance, la mendiante tzigane et les Gavroches des rues à arpenter d'impasse en impasse, sans y jamais capturer vif bout d'espoir, sans jamais vive bout d'espérance. Et le silence qui sirote à petites lampées et grandes nos vies, et la cadence des portes refermées sitôt on y frappe. Et les lettres jamais rendues par facteurs et PTT, mortes closes sitôt timbre aux PTT payé et tamponné?
Et ces procès que nous intentons contre l'indifférence, le silence, la mort, par nos corps devenus insupportables, invivables, sans la dignité qui les fasse tenir debout?
Jusqu'à quand, petit frère, intenter ces procès coûteux et sans verdict de justice contre les fourchettes et les couteaux des pyromanes. Et mythomanes. Et mégalos aux chaises trouées qui dans l'aisance rotent et nous découpent. Et sans Dieu pour déposer contre eux?
Sans Dieu à chaque fois, toujours absent, jamais convoqué pour comparaître à la barre des témoins et montrer du doigt ses pyromanes assassins.
Ils sont là, petit frère, assis à l'ombre de l'Absent, les superbes présents d'Allah qui nous comblent! Sans présents -ni le présent qui les voie- pour la bouche épouse de ramadan. Sans présents à part l'absolue prédication de Sa parole absolutoire. Qui ne permette à épouse de cocufier son ramadan!
Là, qui nous mènent à tous les abattoirs, tantôt à la prompte massue qui ne sait lire ni écrire(*), pour notre salut éternel -disent-ils, tantôt à la douceur des maux qui nous laminent, à la divine piqûre de fatwas, toutes aussi promptes que la massue, qui "la" piquent et nous la massent!
Là, toujours diligents, petit frère, pour nous mener droit au paradis, et dans la camisole de force, à nos fers ferrés. Sinon l'enfer nous voyant fourvoyés sur le chemin, au dernier mangera ceux qui auront survécu aux bûchers terrestres!
Écoute le mufti qui roucoule, cravachant nos maux! Regarde-le nous montrant de la pointe du sceptre qui soulève ses bas côtés à l'ample robe des cieux, gracieuses à qui les brigue et mande au bout du chemin des méritants, au milieu du jardin mérité, de mille bassins et fontaines dorées entourées, les douceurs divines!
Regarde, petit frère, sous les basques qui s'évasent, ce que nous réservent les divines alcôves qui nous enchantent!
"Et hue! dia! croyants! Vous en voulez ou pas de ces douceurs divines?"
Les appas et l’appât que marchands d'illusions nous injectent dans leurs piqûres. Pour nous décapiter. C'est qu'ils nous veulent tous des Bouts à zizi, comme Mohamed Bouazizi mais sans la tête! Pas cogitant du tout, à la rigueur si cogiter nous tente, ne cogitant que par le tronçon de chair retranché de son bout!
C'est pourquoi, outre les bûchers sataniques de Bouazizi et ses frères de feu, ils ont inventé, sacrés, les bûchers de la haine divine. Des tonnes de Bouzizis s'y jettent au fil des jour, entre les ablutions de la prière matinale et la prière qui scelle le jour. Tandis que d'autres bienheureux attendent leur tour. Tous, dieu merci, rachetables à l'enfer promis pour autant qu'ils acceptent qu'on leur retranche, à coups de piqûres endormant le cogito temporel et profane, à chaque Bouzizi le tronçon de bout qui pense. Tandis que l'autre, que la géhenne du mufti ne menace de ses braises ni tance, droit et tout ouïe à la coquetterie céleste, aux houris qui minaudent et l'appellent, panse ses maux et leur susurre à mufti le baume de ses dits.
"Va, petit frère, bondis, saute au paradis qui te hèle!" Et le coton céleste, son satin et ses fanfreluches, te tirent du nez. Jihad en Syrie! en série jihad partout! souris aux anges, petit frère, bout de chair martyre qu'on panse! danse autour du feu, le temps que là-haut les promises t'allument un bâton d'ambre! Panse ton machin le temps qu'elles préparent au sultan son bain ambré.
Puis.. au feu! et que ça saute!
Au suivant!...."
Ils sont là, petit frère, assis à l'ombre de l'Absent, les superbes présents d'Allah qui nous comblent! Les pyromanes qui brûlent et fument nos phénix. Et qui clappent et se pourlèchent, tout le temps que le doux fumet leur titille mèches de saints et les naseaux. Ils reniflent haut l'eau de notre sel, le zeste de notre citron et les senteurs zélés de l'estragon au jus de cumin. Ils renâclent fort les essences des hosties, l'eucharistie qu'exhale, toute vertu, nos bûchers. Et quand nos cendres sont servies après dessert aux agapes, à pailles et pincées dévotes se disputant la poudre noire d'Afghan, ils sniffent et crient: Allahou akbar! Dieu est grand!
Jusqu'à quand, petit frère brûlant vert pour les agapes de nos saigneurs, le théâtre de Beckett à vivre guichets fermés, à répéter jour et nuit, à la vie, au théâtre à ciel ouvert de la vie? A quand Fin de Partie sans le noir théâtre, petit frère, et l'absurde noir pour metteur en scène?
Quand enfin ces procès que réclame ayants-droits et les âmes de leurs damnés, qu'il faut engager ici et maintenant contre le désespoir, ses artisans et ses apôtres?
A.Amri
12.03.2013
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*- Expression empruntée à l'arabe لا تقرا لا تكتب, qui signifie:" impitoyable"
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